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Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : Que voulez-vous dire lorsque vous affirmez que le naturalisme n'existe pas au cinéma, alors même que " La Ville... " est à ce jour votre film le plus charnel et le plus prégnant ?

Robert Guédiguian : Le cinéma n'est pas une photographie du monde, une peinture naturaliste à la Zola. L'art n'écrit pas le monde tel qu'il est, c'est toujours un point de vue. Même les excès de morts à la fin du film redeviennent codés, cela devient lyrique et s'apparente plus à l'opéra qu'au naturalisme. Si je voulais travailler le cinéma le plus naturaliste du monde, je ferai des films américains.


Objectif Cinéma : Comment comprendre la scène de l'Internationale où Paul chante un refrain dans toute les langues ? La séquence semble pathétique. Comment l'avez-vous écrit ?

Robert Guédiguian : Pour moi, c'est la scène la plus horrible du film. D'ailleurs quand il a fallu tourner la scène, je disais que je ne voulais pas le faire, que j'allais boire un coup au bistrot, je faisais un peu le clown, ce qui est mon habitude sur le plateau. Je leur disais "démerdez-vous" et je partais. Je ne supportais même pas ce que disait Paul sur son abandon et ses parents, le fait qu'ils chantaient sans cesse cette chanson. Ma génération n'est pas issue de l'Internationale, et pourtant on ressent fortement cette désillusion et cette trahison, alors même que le rire fuse.
C'est un rire exutoire, pour respirer et éviter de pleurer.


  Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : Est-ce à dire que c'est fini ?

Robert Guédiguian : Non, car L'Internationale sera le genre humain dans le cadre de la Mondialisation. Pourquoi ne pas imaginer un million de personnes chanter l'Internationale sur les problèmes de chômage, de culture, d'environnement et de santé que l'on connaît ?


Objectif Cinéma : Votre film fonctionne sur un principe de mise en scène identique à celui que Fritz Lang utilisait dans " M le Maudit " avec le monde d'en haut, celui de la bourgeoisie des affaires et des hommes politiques, et le monde d'en bas, celui des petites gens, des ouvriers de la pègre locale. Ces deux sphères sociales se rejoignaient dans leur cible commune à abattre, le tueur d'enfant, mais aussi dans leur connivence du mensonge et d'une morale du profit. Ce qui circule entre ces deux mondes est la loi de largent tout comme dans ceux représentés dans "La Ville est tranquille"

Robert Guédiguian : Ce que vous remarquez est très intéressant, car je n'y avais pas pensé, et pourtant je me souviens très bien de la première scène du film du cinéaste allemand, avec les enfants dans la cour, chantant une ronde. Ce sont deux mondes qui ne se parlent pas et c'est un des dangers de notre société où les mondes se séparent de plus en plus. Il y des gens qui ne savent absolument pas comment vivent leurs plus proches, leurs voisins. Sur des choses très minimes, de la vie de tous les jours.