Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Objectif Cinéma : Comment avez vous envisagé l'aspect documentaire du film alors que vous n'utilisez pas d'archives ?

Orso Miret : C'était une donnée importante dès le début du scénario... Je voulais réutiliser les éléments du documentaire dans la fiction car ils sont très révélateurs, notamment l'histoire du cimetière d' Ivry. On part de cet événement, de cette tentative de destruction totale d'un ennemi imaginaire, en l'occurrence les résistants fusillés puis incinérés pour ne pas laisser de traces. C''est le travail inverse de reconstitution, de recherche d'identité. Le sujet me semblait d'une richesse telle... Je savais que différents problèmes contemporains (religieux, politiques) se grefferaient sur le film. En ce qui concerne les archives, j'ai vu évidemment "Shoah", qui m'a totalement concerné comme homme et comme cinéaste. C'est un grand film de cinéma. J'avais lu l'entretien de Lanzmann sur la représentation, qui m'a amené à me poser de grandes questions : "qu'est ce qu'on filme quand il n'y a plus rien ? " "qu'est ce qu'on filme quand on évoque le passé ? " Sa volonté de refuser les images d'archives sous prétexte qu'elles aient pu faire l'objet de manipulations, m'interpellait. Je me suis interdit alors l'utilisation d'images d'archives, sauf au début du film, dans un contexte précis : je place alors le spectateur dans la position de lui faire croire à ces archives. Quand on fait un film sur un événement passé, on commence par ressortir les archives, on restitue l'époque et on commence la reconstitution. Là, je souhaitais prendre un peu le spectateur à contre- pied : arrêter l'image sur le sens, et compléter le sens de ce qu'on est amené à prendre au premier degré. D'autre part, il fallait réussir à montrer à la fois des événements qui peuvent avoir des répercussions très fortes, et concrètement, filmer le père, personnage central, qui meurt avant d'être découvert.


Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : La très belle musique de Gorecki installe un rythme très intéressant, comment avez-vous travaillé ?

Orso Miret : J'étais parti sur l'idée d'une musique originale et j'ai rencontré une personne qui travaille sur les distorsions de sons, donc pas vraiment un compositeur. On a commencé à travailler sur des chants militaires mais ça n'a pas marché. On a alors refait le film sans musique, ça lui a permis aussi d'avoir son propre rythme. Puis j'ai désiré mettre quand même des musiques en contrepoint, j'étais tenté par Chostakovitch, mais c'était trop, la musique écrasait les images. J'ai finalement choisi Gorecki, cette musique très belle, tout à fait dans l'esprit du film, avec un côté héroïque intéressant. Je voulais qu'elle apparaisse dès le début, sur le générique, pour la retrouver ensuite à la fin. Elle installe ainsi vraiment quelque chose de spécial.