Objectif Cinéma :
Je dis ça parce qu'il me
semble que ton film est également très français,
qu'il est moins violent que s'il avait été
américain. Quand je parle de violence, ce peut être
une violence esthétique ou idéologique et
pas seulement physique ou morale.
Hervé Le Roux : C'est
une bonne question. Je ne sais pas... Le film reste un divertissement,
donc il n'y a pas de raison à ce qu'il y ait une
violence morale ou psychologique plus forte. Après
sur le traitement, je ne sais pas...
Objectif Cinéma :
Est-ce que les quelques pépites
burlesques, dans le film, étaient un moteur de l'action
ou bien est-ce que c'était juste des gags parsemés,
presque de manière gratuite.
Hervé Le Roux : C'était
plus des gags parsemés car il s'agit de mélange
des genres. Les moments burlesques sont juste des points
de bascule. Ce pourrait être un film plus radical,
c'est vrai.
Objectif Cinéma :
Une scène est radicale, celle
ou le personnage rentre chez lui. J'ai pensé à
un artiste français qui avait fait une performance
il y a quelques années à la fondation Cartier,
une variation sur les tartes à la crème où
lui était en slip sur la scène ; il se prenait
des tartes à la crème de tous les côtés
et ça finissait par devenir extrêmement violent,
atroce.
Hervé Le Roux : Oui,
effectivement, c'est quelque chose qu'on trouve dans le
cinéma burlesque, ça parle de cruauté,
enfantin donc de cruauté. Dans le film, on est limite,
dès qu'on approche des choses qui sont proches de
la BD, du cartoon, c'est purement comique, et en même
temps dès que c'est incarné par les comédiens,
quelque chose qui serait du pur burlesque, qui ferait uniquement
rire dans un cartoon, devient très cruel. On voit
ça avec les Laurel et Hardy. Des gens pleurent en
voyant leurs films parce que c'est d'une cruauté
insoutenable, d'un sadisme total. Il y avait ça un
peu dans la scène du goudron. On a montré
le film en cours de montage et des spectateurs ont réagi
comme cela, ils étaient très mal à
l'aise. On a joué sur le bruitage pour déréaliser
cette violence, qu'il n'y ait plus cette sorte de malaise
qu'il y a dans le cartoon, des gens qui se prennent des
coups de marteau sur le tête sauf que, ici, ce sont
de vrais gens.
|
 |
|
|
Objectif Cinéma :
Dans cette scène, il y a
quelque chose qui tient presque de la performance artistique,
le coup du vélo accroché, etc : ce n'est pas
un burlesque qui déboule sans crier gare, c'est une
préparation presque esthétisée.
Hervé Le Roux : Ah
oui, on voulait que les trois filles soient des esthètes
du crime (rires). Mais pour finir sur la question de la
violence, il y a un seul moment où j'ai eu un doute
par rapport au problème d'autocensure, c'est sur
la scène du pare-brise cassé. C'est pour ça
qu'il y a cette phrase sur "ce n'est que du cinéma".
Je ne m'interdis pas de faire le plan, mais j'ai besoin
de dire que ce n'est que du cinéma.