UN FILM D'ACTEURS
Françoise Decaux :
J'adore les acteurs. J'adore le travail avec les acteurs,
vraiment ! Moi, j'ai été actrice, et autant
j'adore le théâtre, autant me retrouver devant
une caméra, je déteste
Il n'y a pas
de loi, on peut faire des catégories, peut-être
? Clémentine, c'est une comédienne, une vraie,
au sens beau du terme
Sophie, elle est pas encore
comédienne, elle est actrice. Elle a jamais fait
de théâtre, par exemple. Elle est toute brute.
C'est le premier rôle qui lui arrive où, j'allais
dire, elle doit interpréter quelque chose. Jusqu'à
maintenant, elle a essentiellement été utilisée
pour sa plastique. Ça a représenté
un gros travail.
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Mais, j'adore quand les gens se
dépassent : j'adore voir les performances d'acteurs
l'être humain, l'au-delà du comédien,
l'être humain, oui, c'est ça
Parce que
c'est très bien de faire trente fois la prise de
la main qui prend le verre, je trouve ça très
bien, mais ce que j'aime c'est l'humain. Les acteurs, leurs
visages. Je préfère préserver les acteurs
que la technique. Sur un tournage, on travaille beaucoup,
et comme je viens du théâtre, j'aime le travail
de fond avec les acteurs, et je ne veux pas qu'on les ennuie
avec d'autres considérations. Ce sont les rois. J'aime
pas qu'ils soient écrasés par la technique.
Je demande toujours que les techniciens se mettent à
la disposition des acteurs et pas le contraire. C'est une
volonté énorme. Par exemple, dans Le Pacte
des Loups de Christophe Gans, je n'ai pas été
émue parce que les acteurs n'existent pas comme ils
devraient exister. Je trouve dommage qu'avec tant de moyens,
on se soucie finalement si peu des acteurs. Il y a des acteurs
magnifiques, on retrouve Edith Scob, Jean Yanne et d'autres,
et il n'y a que Vincent Cassel qui réussisse à
tirer son épingle. Tous les autres, tu sens qu'ils
sont rien. Il n'a pas passé de temps à les
faire sortir, les faire exister à l'image : ils sont
filmés comme le décor
il n'y a qu'à
les dessiner, les animer ! Moi, c'est le contraire : les
acteurs en priorité, l'image en second.
LIZA, LA MERE ABSENTE
Françoise Decaux :
Ce personnage a deux origines. Moi, je viens des années
70, où il y a eu toute cette folie autour des femmes,
autour de la maternité qui coexistait avec l'idée
de la liberté sexuelle, un côté un peu
débridé où certaines femmes faisaient
des enfants avec des hommes différents, et ce sont
les hommes qui s'en occupaient
enfin, c'est ce point
de départ qui m'intéressait, bien que ce ne
soit pas un film autobiographique. Mais, je voulais restituer
cette émotion des années 70, où le
meilleur côtoyait le pire. Et, en fin de compte, cette
femme très généreuse est prisonnière
de cette logique de la recherche du plaisir, ce qu'on a
nommé " la tyrannie du plaisir ". Elle
recherche l'homme, et un certain bonheur avec un homme,
et du coup, même si les enfants existent et ils existent,
cette recherche du plaisir, donc de la femme, a détruit
son côté maternel. Et ça, c'est une
sensation qui me vient des années 70, et qui est
à notre époque très choquante : qu'une
mère puisse laisser ses enfants de côté
pour s'épanouir en tant que femme.