Objectif Cinéma :
La version intégrale de Roselyne
et les lions redonne au film sa dimension de fresque
Pour
reprendre l'idée du triptyque, il n'y avait qu'un
morceau visible jusqu'à maintenant
Jean-Jacques Beineix : En
réalité, on avait découpé des
bouts de chacune des parties du triptyque. On les a désormais
entièrement rétablies. Il y avait Hassan,
ce musulman qui veut être instituteur et raconte comment
on peut être un garçon d'écurie pour
gagner des sous et faire autre chose. Thierry est d'une
certaine manière un déclassé, qui va
retrouver une position sociale en étant passé
par la petite porte. C'est ce que j'ai fait. Je suis sorti
de bac +2 pour porter des sandwiches sur les plateaux de
cinéma. J'ai vécu cela.
Objectif Cinéma :
Vous avez aussi changé des
musiques, comme celle qui ponctue les apparitions du professeur
d'anglais.
Jean-Jacques Beineix : On
l'a fait effectivement par moments mais on n'a pas eu énormément
de moyens. Si je poussais les choses plus loin, je referai
une dernière version où je réenregistrerais
les musiques. Je ne peux pas faire abstraction du fait que
mes films se soient faits massacrés, et qu'ils aient
été relativement diffamés. Je ne peux
rien faire contre cela, je peux juste apporter les preuves.
Sur la durée, on saura de quel côté
se trouve l'imposture. C'est pour cela que je me suis installé
dans un travail de longue haleine. Les combats ne se déroulent
jamais sur un court laps de temps. Il faut tenir.
Objectif Cinéma :
C'est toujours le système
de ceux qui ont la carte et ceux qui ne l'ont pas.
Jean-Jacques Beineix : Oui.
Cela permet de ne pas s'installer, de ne pas ronronner,
ça rend les choses aussi plus difficiles. Avoir la
carte maintient en vie d'une certaine façon
Mais il y a beaucoup d'alternatives. Et je ne suis plus
sûr que le cinéma soit le seul lieu pour moi.
Objectif Cinéma :
Quels seraient ces autres lieux ?
Jean-Jacques Beineix : La
télévision, internet, le dvd. Je pense qu'un
jour le dvd pourrait court-circuiter la salle.
Objectif Cinéma :
Vous voulez dire sortir directement
un film en dvd ?
Jean-Jacques Beineix : Oui.
Quand on voit ce que sont les salles de cinéma aujourd'hui,
ce que sont les rapport avec les distributeurs : leur manque
d'intérêt et d'engagement est tel, qu'il justifie
presque de faire un repli stratégique et d'abandonner
la salle.