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  Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : J'aimerais qu'on parle de la manière dont vous abordez le passage du temps au cinéma, notamment à travers les flash-backs. Je pense à Jude de Winterbottom, au Parfum d'Yvonne et au Mari de la coiffeuse de Leconte.

Eduardo Serra : Pour le mari de la coiffeuse, on n'avait pas accentué les différences entre les époques, au contraire il n'y avait pas de traitement particulier pour marquer le flash-back. Par contre, dans Jude, les changements sont visibles, les chapitres qui structurent l'ensemble sont fortement marqués. Pour Jude, il y avait une feuille de route très précise par rapport à la construction du scénario, on jouait sur les dominantes colorées, sur les filtrages, on jouait sur les techniques de laboratoire et aussi sur l'éclairage, sur les contrastes et sur l'imposition de la lumière principale. Dans le parfum d'Yvonne, c'était le contraire : le présent était traité comme un flash-back, avec un traitement du labo qui noircissait et donnait du grain, puis il y avait un deuxième niveau où l'ensemble du film traité normalement, puis un troisième, le film 8 mm qu'on retrouve à la fin.


Objectif Cinéma : Dans le prologue de Jude, j'avais l'impression que vos référents étaient davantage photographiques que picturaux...

Eduardo Serra : A la limite il n'y a pas de référent précis mais un référent général qui est un traitement...Les rares fois où on voit quelque chose en noir et blanc, c'est en général de la couleur repassée en noir et blanc, c'est de plus en plus rare d'avoir un vrai noir et blanc avec tous les filtres existants... Dans Jude, c'était de la pellicule noir et blanc, avec des filtres vert jaune rouge qui faisaient partie des outils de la photo noir et blanc.


Objectif Cinéma : A ce propos, j'ai entendu dire que Leconte avait deux versions de la fille sur le pont, une en couleurs pour la télé et une en noir et blanc pour le cinéma...

Eduardo Serra : Oui, il n'a pas eu la possibilité de tourner en vrai noir et blanc, alors il a trouvé un procédé au laboratoire qui fait qu'apparemment cela donne un effet plus intéressant que de tirer la couleur sur du noir et blanc, mais cela ne permettra pas de mettre un ciel d'orage ou tout autre effet spécifique au noir et blanc.


Objectif Cinéma : C'est un peu la loi de l'audimat qui dicte l'esthétique d'un film...

Eduardo Serra : Oui. On ne met plus plusieurs millions de francs dans un film dont le noir et blanc risquerait de faire fuir les gens...