Objectif Cinéma : C'est
pour vous le principe ou la qualité numéro
un du producteur ?
Frédéric Brillion
: " Ce n'est même
pas un principe, ça se passe comme ça. Si
un scénar ne nous plaît pas, il nous plaît
pas, même si demain on nous dit que c'est la bonne
recette qui fonctionne. J'ai adoré la haine par exemple.
Mais si j'avais lu le scénario, je suis persuadé
que je n'aurais jamais voulu le produire ! C'est vrai qu'à
postériori on se dit qu'on a été con
parce que le film n'est pas mal, mais j'ai l'intime conviction
qu'à la vue du scénario je ne me serais jamais
engagé dessus...J'avais bien aimé Métisse
parce que j'avais trouvé que c'était assez
bien réalisé, mais ça ne m'aurait pas
suffisamment convaincu...On est assez classique ici finalement,
je dirais qu'on fait un cinéma assez classique haut
de gamme qui nous ressemble peut-être, qui a cette
cohérence là. Je pense que c'est du bon cinéma,
c'est des bons sujets, je pense qu'on est en train de devenir
la nouvelle génération des producteurs susceptibles
de produire ce type de sujet. Il y a des familles qui se
créent, ce que font Lazennec, Pelléas, Vertigo,
Why not pour citer les gens de notre génération
qu'on connaît bien. C'est quand même assez marrant
comme d'une certaine façon il y a cinq, six, huit
boites qui ont décollé en même temps,
qui se connaissent très bien. On a tous un positionnement
très précis, on se marche pas du tout dessus
: je n'ai aucune envie de produire les réalisateurs
de Why Not et je crois que le contraire est vrai. On est
une palette de producteurs qui frôlent la quarantaine,
produisent à la fois des réalisateurs un peu
chevronnés et des premiers films. "
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Objectif Cinéma :
Quel est l'histoire d'Epithète
Production ?
Frédéric Brillion
: " Epithète a
été créée par deux personnes,
Gilles Legrand et moi même. On est des amis d'enfance.
Gilles a travaillé sept-huit ans comme technicien,
quant à moi je suis ingénieur en hydraulique
! Point commun avec Alain Rocca, ce qui est assez étonnant
! Puis je suis rentré dans le cinéma, j'ai
travaillé deux-trois ans comme technicien. En 1985,
on a monté une boutique qui tenait en une pièce,
deux personnes autour d'un bureau et " qu'est-ce qu'on
va faire ? "...On a démarré en faisant
de tout. Le principe qu'on avait au départ, d'ailleurs
pas très construit tournait autour de la nécessité
de faire de l'argent et l'envie de faire des longs métrages.
Pour faire du long métrage, il faut avoir un peu
de moyens, donc pendant cinq ans on a ramassé tout
ce qui traînait, on a fait de la pub, des clips, des
dessins animés, de la télévision, des
courts métrages, une palette d'un tas de petits produits
qu'on arrivait à faire. Au bout de cinq ans on s'est
rendu compte de la limite du système : chaque marché
est un secteur en soi avec ses contacts, ses méthodologies,
sa construction financière, et que c'est impossible
d'être partout. Au bout de cinq ans, la boîte
s'était un peu construite, on avait un peu de moyens,
on a décidé de se lancer dans le long métrage.
Dans toutes les autres activités qu'on a développées,
il n'y a que la pub qui aujourd'hui est cohérente
économiquement parce qu'assez rémunératrice
et cohérente artistiquement parce qu'elle est le
plus haut de gamme de ce qui se fait dans le commanditaire
et cohérente humainement parce qu'il y a beaucoup
de ponts entre les réalisateurs et techniciens de
pub et de longs métrages. Cohérente économiquement
parce qu'elle rapporte de l'argent à court terme
alors que le long métrage rapporte à long
terme. Ce sont deux systèmes économiques qui
ont une véritable cohérence. Il y a un cycle
très rapide, un peu comme la lune et le soleil autour
de la terre, il y a celui qui met un jour et celui qui met
un an ! C'est le même principe ! Le premier jour de
ma vie où j'ai travaillé sur un film de cinéma
comme stagiaire, le producteur faisait son premier long
métrage, c'était Charles Gassot, qui faisait
du long métrage et de la pub. J'étais à
bonne école ! Le problème, c'est que beaucoup
de producteurs de pubs qui voudraient passer au long ne
le font pas par peur de perdre de l'argent, et les gens
de longs métrages ne s'intéressent pas beaucoup
à la pub et n'ont de toute façon pas les compétences
pour le faire. Ce sont vraiment deux compétences
différentes, il faut arriver à les créer.
"