" PARLE DE CE QUE TU SAIS "
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Nicolas Boukhrief : "
Quand j'ai pu réaliser mon premier film, j'ai eu
la volonté de parler de ce que je connaissais. Je
pensais qu'il y aurait nécessairement un peu de vérité
si je parlais de ce que je connaissais. C'est ce que je
conseille aux jeunes cinéastes. La plupart veulent
faire des films qui ressemblent à ce qu'ils aiment.
Mais parle plutôt de ce que tu sais et de ce dont
tu as envie. Métisse, c'est un film très
autobiographique pour Mathieu Kassovitz. J'adore Nord
de Xavier Beauvois par exemple, parce qu'il parle de l'alcoolisme
de son père. Et l'alcoolisme est un sujet peu souvent
traité au cinéma par rapport aux ravages qu'il
commet en France. Une fois que tu parles de ce que tu sais,
c'est dans tes cadres qu'on verra si tu es réalisateur,
qu'on verra ta direction d'acteurs, tes mouvements de caméra,
etc. (...) Tourner des films te fait grandir énormément,
c'est comme faire un voyage. Tu deviens plus mûr parce
que tu es confronté à tant d'épreuves
! Kurosawa est un des plus grands voyageurs du siècle
! Tu voyages dans ta tête, tu embarques plein de gens
et c'est incroyable ! Mais tu ne peux le faire vraiment
que si tu parles de ce que tu sais au départ. Regarde
Mean Streets ou Accatone !
" Si tu parles de ce que tu sais,
tu peux plus facilement penser cinéma, parce que
tu n'as pas de doutes sur la matière. Tu arrives
aussi à mieux faire parler les personnages. Tout
est possible, tu peux parler de l'univers petit-bourgeois,
tu peux tout faire. J'aime bien Desplechin, mais pas son
cinéma. La caste dont il parle m'intéresse
peu. Mais je le respecte énormément parce
qu'il sait de quoi il parle et que c'est bien cadré,
filmé. "
ESKWAD
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Nicolas Boukhrief : "
Eskwad est une boîte de production qui fait deux-trois
films par an. C'est un peu frustrant par rapport à
Canal Plus Ecriture, car on peut moins développer,
il faut qu'on fasse les films, cela veut dire plus de boulot
de production. A Canal Plus Ecriture, dont s'occupe maintenant
François Cognard, on développe quinze projets
par an. J'aurais voulu dire aux auteurs des scénarios
que je recevais à Canal Plus Ecriture de " ne
pas faire comme ". Si tu décides de faire des
films à la manière de, prends au moins un
cinéaste européen comme modèle. Mais
ne pars pas sur un genre, ne fais pas de film cher, etc.
Il y a des espèces de lois. Il faut penser petit
budget, il faut être malin. Il faut penser à
qui tu veux vendre : à Canal Plus, à Arte,
etc. Tu as plutôt intérêt à faire
un film d'auteur, de toute façon, ou alors une comédie
à la française, ce qui peut-être bien
aussi. Voir ce que le système est prêt à
accueillir avant d'essayer de le briser, surtout quand t'as
jamais fait d'images. Parce que sinon tu te fais jeter,
le système s'en fout : les mecs veulent faire de
l'argent. "