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Dead Zone (c) D.R.
Objectif Cinéma : A-t-il été plus dur de réaliser des films dont vous n'étiez pas le scénariste original ?

David Cronenberg : Quand j'ai commencé à faire des films, je pensais que quelqu'un qui n'écrivait pas son scénario ne pouvait pas être réalisateur. Quand j'ai fait Dead Zone, qui est une adaptation d'un roman de Stephen King, j'ai apprécié ce travail, j'ai réalisé qu'il m'était possible de faire un film sans qu'il soit un scénario original qui ne m'appartenait pas. La seule chose qui m'importe, c'est de sentir une connexion entre le scénario et mon univers.


Objectif Cinéma : On dit souvent de vos films qu'ils sont froids, chirurgicaux .

David Cronenberg : Tous mes films sont des comédies! Il y a des éléments comiques dans chacun de mes films ; quant à la froideur qu'on peut me reprocher, j'ai du mal à la percevoir. C'est plutôt un calme, une sérénité dans ma mise en scène qui contraste avec la violence de certaines choses que je montre. Je ne cherche pas forcément à créer des émotions, c'est une démarche très hollywoodienne de devoir apporter les émotions comme l'amour, la peur, la haine selon un schéma défini. Je préfère utiliser mon propre système, mes envies.


  David Cronenberg (c) D.R.

Objectif Cinéma : Votre cinéma est celui de l'organique. Quel est votre avis sur l'émergence de ce type d'images dans le cinéma actuel ?

David Cronenberg : La sensation du corps humain a toujours été centrale à mon travail depuis que je suis tout petit. Pour moi, le premier élément de l'existence humaine est le corps, et il représente le moyen le plus proche pour atteindre la réalité. Plus on va loin dans son corps, plus la réalité devient virtuelle. C'est un concept qui peut paraître abstrait mais il est surtout viscéral. Par exemple le premier Alien reprend le thème de mon film Frissons, un parasite né dans le corps et qui finit par vous sauter à la figure, il utilise aussi des images que j'ai montrées. Mais il y a tellement de manières de se paralyser en tant que cinéaste, que cela ne m'inquiète pas.


Objectif Cinéma : Est-ce que la censure a des conséquences dans votre manière de travailler ? Est-ce que vous vous autocensurez ?

David Cronenberg : A mon avis, il est impossible pour un cinéaste d'ignorer la complexité de la société dans laquelle il vit, et plus encore par rapport au cinéma qu'à tout autre forme d'art, en raison de la technologie, du financement, du nombre des gens impliqués, et de l'accessibilité de cet art. Un film est très vulnérable, surtout quand il met beaucoup d'argent et de technique en jeu. Si tu t'autocensures, tu es un artiste fini, tu n'as plus rien à offrir au public. En même temps, tu crées un produit qui s'adresse à différents types de personnes, et aussi à des enfants. C'est un travail délicat d'équilibrage, mais je reste opposé à toute forme de censure, en particulier parmi le monde des adultes. Dans chacun des films que j'ai faits, chacun avait sa propre écologie. Dans Dead Zone, il y a un peu de gore, de violence, La Mouche en contenait plus. Ce dosage varie selon les besoins d'un film mais ne représente pas un acte de censure. De plus, c'est toujours dur de savoir ce que recherche son public, on a envie à la fois de le séduire et de le repousser. Chaque cinéaste doit trouver son accord avec lui-même et la société. La notion d'internationalité est encore plus complexe car chaque pays à sa propre motion de censure, mais c'est une autre affaire.