Objectif Cinéma : Cette
alliance donne une énergie créatrice
Jacqueline Cohen : Il
vous explique que s'il s'arrête de travailler, il
pense tout de suite qu'il est mortel. Il pense qu'il est
mortel parce qu'il va mourir : c'est l'énergie du
désespoir.
Objectif Cinéma : Revenons
un peu à la version française de " Small
time crooks " : la voix qui double celle de Tracey
Ullman est très bien choisie.
Jacqueline Cohen : Oui,
les acteurs de doublage ont connu une belle époque,
même si maintenant ils sont relégués
plus ou moins dans l'ombre, hélas. De toute façon,
on ne peut faire que ça, un acteur fait aussi du
théâtre. Mais on oublie que c'est un métier
très difficile, car on ne joue pas que sur la voix.
Si être acteur c'est se dédoubler, dans le
doublage c'est se détripler : il faut être
soi-même, le personnage, et l'acteur qu'on double
!
Objectif Cinéma :
Et vous-même, quand vous faisiez
l'actrice de doublage, comment le viviez-vous ?
Jacqueline Cohen : Oh
très bien, c'était mon repos par rapport au
boulot d'écriture En plus ça dépend
avec qui on travaille. Si on travaille avec Hervé
Icovic (Société Alter Ego), c'est un bonheur.
Il est passionné, et c'est le seul dans son genre,
même si d'autres sont aussi très sympathiques.
Objectif Cinéma : Mais
en tant que traductrice, vous travaillez comment, combien
de temps vous est-il imparti pour rendre un travail ?
Jacqueline Cohen : Normalement
je demande un mois, je n'ai pas envie de travailler 24 heures
sur 24, je ne suis pas un robot. Si on dit trois semaines,
j'accepte, si Hervé me dit deux semaines j'accepte,
mais il y a des gens qui demandent une semaine. Et on trouve
le moyen de me dire " Quoi tu refuses ? Mais depuis
le temps que tu fais ce métier ! " La qualité
doit être respectée, ainsi que le travail de
l'auteur, le temps d'enregistrement.
Objectif Cinéma : En
tout cas, il n'y a pas de parcours fléché
pour travailler dans le doublage ?
Jacqueline Cohen : Il
n'y avait pas d'école, oui, j'ai tout appris avec
un copain, d'ailleurs j'aimerais citer un grand traducteur,
Eric Kahane, qui était surtout un auteur, il savait
écrire. Maintenant vous avez des gens qui se contentent
de traduire, alors qu'un texte doit être écrit
pour un acteur. Il y a également le problème
de la surexploitation de certains traducteurs qui commencent
dans le métier et qui sont payés à
40% du prix normal ! Non, il n'y a pas de trajet. Mais sur
le plan de l'écriture ou du jeu, il y a parfois des
stages, ça existe.