Objectif Cinéma : Combien
coûte une copie de film ?
Franck Allera : Je
préfère ne pas m'avancer, mais je crois que
c'est à peu près de l'ordre de 100 000 francs
la bobine de 15 minutes. Gaumont bénéficie
d'un tarif annuel.
Objectif Cinéma : Penses-tu
qu'il existe un réel problème au niveau de
la distribution en France, que les distributeurs ne se battent
pas assez contre la rotation des films dans les salles,
de sorte que les films ont parfois un temps d'exploitation
très court...
Franck Allera : Bon
nombre de distributeurs attendent, le Disney, le film de
l'été, la grosse sortie américaine...
La petite salle au fin fond de la France ne va pas aller
chercher par exemple La faute à Voltaire. Un exploitant
qui possède 3 salles en Ardèche, va prendre
Belphégor, Yamakasi, Dinosaure, il n'a pas
le choix. Et le pire c'est qu'il n'y a rien à faire,
c'est devenu une histoire de fric. La loi du marché
est très sévère et le système
des cartes n'a rien arrangé. Je me souviens avoir
entendu que l'UGC Bercy à Paris, était parfois
dans " l'obligation " de mettre des films mauvais,
pour que les gens ne puissent pas trop rentabiliser leur
carte. Le cinéma devient une histoire de business,
et en aucun cas une histoire d'art.
Objectif Cinéma :
Quel contrôle garde un réalisateur
sur son film lors de la distribution ?
Franck Allera : Pour
un distributeur, c'est assez simple. Tu as fait l'artiste,
eux ils font la vente. Par exemple à Gaumont, ils
ont réussi à vendre un film comme Le plus
beau combat, en réalisant un film annonce du tonnerre,
rempli de musique, où ça bouge dans tout les
sens : ainsi , même si peu de monde en France apprécie
le football américain, cela donne peut être
l'envie d'y aller. Pour eux, le seul truc gênant,
c'est le réalisateur d'un film d'auteur qui veut
donner son avis sur le film annonce. Dans leur esprit, il
n'a pas grand chose à faire là, son boulot
était de faire le film, pas le film annonce. Peut-être
on t-il raison, mais pour un réalisateur, c'est dur
!
Objectif Cinéma : Que
fais-tu à présent à Arte ?
Franck Allera : Je
suis chargé de post produ-ction, mon expérience
à Gaumont a certainement joué en ma faveur
pour le poste. C'est un petit peu plus calme car Gaumont,
c'était en moyenne du 9h - 20h, et même parfois
le dimanche pour les jours d'avant-première ! Je
travaille dans le cadre de l'unité Thema. Arte co-produit
beaucoup de choses, et dès qu'on arrive à
l'étape du mixage, de la post production en général,
nous leur donnons un coup de main au niveau des normes.
Idem pour les achats. J'accompagne les films jusqu'au PAD
: les bétas numériques, qui serviront le jour
de la diffusion. On assiste les producteurs et les réalisateurs
sur la post-production et ensuite le matériel part
à Strasbourg. Je passe donc, pour mon plus grand
plaisir, mes journées au téléphone
avec des laboratoires, des réalisateurs et des producteurs.
Objectif Cinéma :
Comment se décompose le travail
?
Franck Allera : On
travaille pour que le film soit accessible aussi bien aux
français qu'aux allemands, on leur donne les normes
Arte : les niveaux sonores, les normes techniques. Je suis
là pour la ligne technique : par exemple, si on voit
un gros graffiti en français sur une image, on le
signale, car les Allemands n'y comprendront rien lors de
la diffusion.