Objectif Cinéma :
Y-a-t-il des retouches du sujet
même ?
Franck Allera : Non,
ce n'est pas notre boulot, mais ça dépend
de l'ambiance du visionnage. Généralement,
les réalisateurs arrivent anxieux : dès qu'on
leur dit : " ce passage n'est peut être pas très
utile ? ", ils sont perplexes mais restent très
pro. Alors nous, en post production, on essaie de ne pas
en rajouter une couche !
Objectif Cinéma :
Peux tu nous parler de ton expérience
du court métrage ?
Franck Allera : Tout
a débuté par mon bac cinéma. En seconde
je n'avais encore rien fait, et je me suis décidé
à emprunter le matériel du lycée. On
n'a pas écrit de scénario, j'ai commencé
par une mise en abîme du cinéma ; ce qui est
très souvent le cas quand on débute. J'ai
fait ça en Hi-8, c'était un petit film entre
amis. Première expérience bénéfique
puisque je me suis inscrit pour le concours vidéo
de Paris, et j'ai obtenu le premier prix. Cela m'a ouvert
les portes d'une mairie, qui m'a demandé de faire
quelque chose sur la campagne préventive du Sida.
J'ai eu peur, mais on me donnait de l'argent, j'avais 20
ans... Cependant ce n'était pas facile car tout ce
que j'avais vu à propos du sida m'avait profondément
ennuyé excepté le Klapisch. J'ai pris ça
sur le ton de la rigolade et on l'a fait sur 2 jours. Tout
le monde était content, et je m'en suis servi comme
carte de visite pour me vendre. Le film est notamment passé
au festival de Grenoble. C'était très dur,
car bien que je ne l'ai pas financé, j'étais
mon propre producteur. Quand tu es autonome, il faut s'occuper
des copies par exemple. Et mine de rien, une copie en labo
c'est 5000 francs quand tu tournes en 35mm. Et puis il a
fallu aussi diriger pour la première fois une vingtaine
de personnes sur un plateau, alors que j'avais toujours
travaillé pratiquement seul.
Objectif Cinéma : Comment
as tu vécu ce changement ?
Franck Allera : Quand
on te propose à 20 ans de tourner en 35 mm, tu fonces
! Au début on te regarde un peu comme un chien fou.
On a tourné en deux jours et je ne demandais que
des plans compliqués, des travellings compensés,
des mouvements circulaires à 360°. Je souhaitais
que Michel Leeb joue dans le film car il a un côté
Tex Avery que je voulais exploiter. Il a été
d'accord trois jours avant de refuser, question d'argent
?! Ensuite tout s'est très bien passé. Maintenant,
je crois avoir gagné la confiance des gens qui m'ont
pris pour un fou au début. Après, le plus
dur est de faire vivre " le bébé ",
et ce n'est pas facile car comme je le disais, une copie,
c'est 5000 francs la bobine. C'est problématique
quand tu fais 2 festivals par exemple. Ensuite, quand on
te demande des VHS, tu en demandes, tout de suite une cinquantaine
! De toute façon, si le film n'a pas non plus trop
vécu, c'est aussi parce que je ne voulais pas qu'on
me colle l'étiquette Sida.
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Objectif Cinéma :
Par la suite comment es-tu arrivé
à tourner le deuxième ?
Franck Allera : Dans
la mesure où l'écriture n'est pas ma spécialité,
j'ai repris l'idée du premier, la mise en abîme
sur le cinéma. Avec tout le réseau de relations
que j'ai pu constituer sur trois ans, j'ai pu faire un film
gonflé en 35mm, pour 8000 francs, ce qui est un bonheur
absolu.
Objectif Cinéma : Comment
t'es-tu débrouillé ?
Franck Allera : Avec,
entre autres, une caméra prêtée par
Kodak, des optiques également en prêt chez
Alga, et 50%de réduction sur la pellicule.