Objectif Cinéma : Durant
le temps passé à La Fémis, as-tu eu
le temps de te faire des contacts pour travailler dès
ta sortie de l'école ?
Laurent Gabiot : Oui,
car le département production est constitué
d'élèves qui travaillent très tôt.
En fait, il est fréquent qu'ils soient à l'école
tout en travaillant déjà activement dans des
maisons de production. La Fémis est sans conteste
une banque de données importante. Ainsi les personnes
de la section production nous appellent dès qu'ils
ont besoin de quelqu'un sur un court métrage, et
il est fréquent d'enchaîner les tournages.
Mais il ne faut pas se leurrer, on est assez mal payé,
car on a pas l'expérience de gens confirmés.
Mais c'est évidemment aussi pour ça qu'on
nous emploie, on ne prend pas très cher quand on
débute.
Objectif Cinéma :
Sur les tournages, on a souvent
tendance à voir le son comme la cinquième
roue du carrosse
Laurent Gabiot : Le
temps dont on dispose pour travailler est très aléatoire.
En général, on a très peu de temps
pour faire le son, le plan de travail étant très
chargé sur un court métrage. Cela pose parfois
des problèmes, car dès qu'on demande un son
seul, les réalisateurs sont assez frileux. Les productions
de courts et moyens métrages n'ont pas de quoi payer
une session en auditorium. De ce fait on essaie de fournir
d'avance tous les sons. Quand on tourne un court métrage,
on peut se retrouver à devoir tourner toute une journée
dans un seul décor. Ce qui fut le cas sur le film
de Thierry Jousse, où pour la séquence du
strip-tease on ne pouvait tourner que jusqu'à 21h.
Il y avait un plan de travail très strict et j'ai
eu besoin de faire une ambiance. On ne m'a laissé
que 30 secondes alors qu'on a fait 5 prises image. En l'occurrence,
j'ai eu un petit problème avec la 1er assistante.
Il était nécessaire d'enregistrer un son seul
des figurants, et il fallait naturellement laisser tourner
un certain temps pour que les gens se désinhibent
un peu. Or on ne ma pas accordé assez de temps. Dans
ces conditions, le son passe un peu à la trappe.
Objectif Cinéma :
Dans ce cas, comment t'organises-tu
pour reprendre les ambiances ?
Laurent Gabiot : Le
plus souvent, je la prends dans ma sonothèque. Cependant,
ça dépend de l'importance du son dans le film,
ainsi que des rapports qu'on entretient avec la production
; car quand on essuie des refus en permanence pour prendre
des sons sur place, on n'est pas particulièrement
motivé pour aller chercher une ambiance. Mais c'est
rare, dans l'ensemble, on arrive à travailler, il
faut juste parfois s'imposer..
Objectif Cinéma :
Comment définirais-tu ta
place dans l'équipe technique ? Et avec qui es-tu
le plus en rapport ?
Laurent Gabiot : J'essaie
toujours d'être discret car il y a une très
grande mise en place du cadre et de la lumière. Le
but est de ne pas trop les déranger tout en suivant
ce qui se passe. En général on ne peut pas
travailler en même temps qu'eux. Ensuite, dans la
préparation du tournage, on discute beaucoup avec
le réalisateur, du découpage prévu,
du rendu sonore souhaité, de la manière dont
il veut travailler. On ne va pas pouvoir employer les même
techniques, parfois le " HF " sera indispensable,
tandis qu'avec d'autres réalisateurs on pourra tout
faire à la perche. Il y a des réalisateurs
qui se moquent d'avoir la voix au loin en plan large, alors
que d'autres dans pareil cas, réclament que la voix
soit très présente.
Certains te donnent des listes de sons voulus, d'autres
non. Ce sont des petites choses qui déterminent le
rendu sonore du film.