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Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : Et à quel poste aspiriez vous étant jeune ?

Michel Fournier : Initialement je pensais être metteur en scène - tant qu'à faire quelque chose, autant être le chef - aussi je pensais être destiné à Vaugirard plutôt quà l'IDHEC, car je me pensais bon en maths. L'année 1966 fut très importante, on est allés voir le directeur de l'école en lui spécifiant qu'il était complètement incompétent, puis on a pris possession des lieux. On s'ennuyait, il n'y avait rien, c'était le vide total, et la prise en main de l'école par les étudiants fut un événement très folklorique : c'était un vrai cirque, 1968 avant l'heure. Nos prédécesseurs ne faisaient rien mais quand nous entreprenions quelque chose c'était n'importe quoi. Ceci dit notre promotion, constituée de Philippe Rousselot, et bien d'autres, fut bonne. On a tous commencé assez vite.

Pour ma part dès ma sortie de Vaugirard, j'ai suivi le tour de France, ce qui ma permis d'apprendre à connaître le territoire. Quand je suis revenu, j'ai décidé de travailler à la télévision, à TV Europe très exactement, qui faisait des reportages de très bonne qualité, mais non destinés à la télévision nationale.


  Objectif Cinéma (c) D.R.

Objectif Cinéma : Et c'est alors que tu rencontras Philippe Garrel.

Michel Fournier : Oui, Philippe Garrel y œuvrait de façon exceptionnelle. Les émissions qu'ils faisaient, non seulement ne seraient pas démodées, mais seraient encore en avance. Je l'ai assisté sur Mouton rouge, une émission consacrée à la musique rock - on a notamment réalisé un reportage sur les Pink Floyd - puis sur 16 millions de jeunes et Zoom qui fournissaient des études très pointues et très prospectives sur la jeunesse. Philippe était en avance sur son temps, il a tout de même réalisé son premier long métrage à 18 ans ( et non à 16 ans, il triche fréquemment sur son âge, c'est un dandy). La toute première fois que je l'ai vu, il était en train de monter un épisode de Zoom, il tournait comme un loup derrière la monteuse et il gambergeait. Il montait alors l'image au feeling avec une grande intuition, la monteuse planait. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi doué. La vraie base du travail était le montage. Philippe est un grand sur ce plan là. Il réalisait d'ailleurs aussi la plupart des costumes. Influencé par Nietzsche et Kierkegaard, on ne discutait nullement de peinture, contrairement à ce qu'on peut lire un peu partout, à peine de cinéma. Il était toutefois fasciné par Godard. " La rupture Godard " mélangé à un aspect littéraire, était pour lui la seule voix à prendre. C'est ce qu'il fit dans Anémone, enlevant par la suite de son cinéma tout ce côté intellectualisant qui a très mal vieilli.