Objectif Cinéma :
L'avantage étant aussi d'arriver
vierge de toutes traces...
Yann Goven : Oui,
surtout pour les autres parce qu'ils s'aperçoivent
qu'il y a une nouvelle place. Ils se disent: "il va
faire un apéritif, nous inviter", mais c'est
très dur car on est forcement très seul. Car
eux sont là depuis des générations,
c'est pas évident, demain tout peut s'arrêter.
Là je travaille, mais si quelqu'un me demande ce
que je fais dans la vie, je ne dirais jamais que je suis
comédien si je ne travaille pas sur le moment. Je
ne suis sûr de rien, si ce n'est de mon désir,
et du sac à dos que je me traîne.
Objectif Cinéma : Y-a-t-il
eu une rencontre qui fut pour toi une véritable révélation
?
Yann Goven : C'est
très simple. Moi je voulais faire du cinéma,
et tous les gens que je rencontrais dans les cours de théâtre
voulaient faire du théâtre. Mais tous les acteurs
que je connaissais étaient passés par le théâtre.
Alors, un jour, un ami m'a emmené voir Philippe Caubère
dans La danse du diable. Je me suis alors intéressé
au théâtre et j'ai accepté de travailler,
j'ai rencontré Isabelle Nanty, qui fut pour moi vraiment
un choc. On est toute une bande dispersée à
droite à gauche, à la télé,
au théâtre, au cinéma, issus des cours
Florent où enseignait Isabelle. C'était le
sommet des cours privés: l'usine. Cependant, quand
il y a près de 1000 personnes, on est sûr de
rencontrer au moins 10 personnes intéressantes.
Objectif Cinéma :
La vérité d'un acteur
reste-t-elle fondée sur le tournage ?
Yann Goven : Pas
forcément, il n'y a pas de vérité par
rapport à ça. Etre comédien, c'est
jouer quelque chose à un moment donné et être
le plus droit, le plus digne, le plus juste possible. Ca
se travaille au jour le jour, et il n'y a pas besoin d 'aller
dans un cours huit heures par jour pour apprendre ça.
Cela se travaille dans la vie de tous les jours. Après
quand on arrive devant la matière, on prend un outil
et on commence à taper, mais si on n'a pas bien regardé
la pierre avant de taper dessus, il faut taper au bon endroit.
Objectif Cinéma : Il
règne souvent un certain obscurantisme sur les cours
de théâtre, qu'est-ce que tu as retenu du cours
Florent ?
Yann Goven : L'envie,
plus que tout. Je suis un peu Breton sur les bords. Je m'en
suis rendu compte durant mes voyages : le Breton est un
peu con c'est bien connu, mais il est tenace. Venant d'un
milieu qui n'avait rien à voir avec le monde du spectacle,
ce fut vraiment l'envie qui détermina les choses.
Aussi quand on se pointe vers les autres, il faut y aller
les bras ouverts avec tout ce qu'on a derrière soi.
Mais il ne faut pas que les autres le voient, donc le sac,
il faut le planquer car sinon tu es vite éliminé
: tu pèses trop lourd.