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Cette phrase est pour moi un flambeau dans la nuit ! Je trouve cela extrêmement juste ! Ozu a peut-être le système de narration et de mise en scène le plus verrouillé du monde et en même temps ses films sont d'une fraîcheur toujours égale, toujours surprenante. J'aime quand la maîtrise crée de l'inattendu, mais l'inattendu du réel, pas celui créé au montage. J'ai vu l'autre jour un film sur Cartier-Bresson, dans lequel il disait : " Quand on veut quelque chose, on n'obtient rien. Il faut se mettre à un endroit et attendre. Il faut attendre que ça vienne et ça vient. " Parler de direction d'acteurs, c'est très joli, peut-être qu'on " dirige ", mais on ne dit pas en tout cas à quelqu'un " sois heureux, sois gai ! ", ou " sois charmante s'il te plaît ! " Non, ça ne marche pas. On capte, on enregistre. Je travaille un peu avant avec les acteurs, on lit le texte, on se le met en bouche, on y réfléchit, on le rythme différemment, on dissipe les malentendus, ça ne passe pas forcément par des explications, mais plus par une approche physique entre nous. Les explications générales c'est surtout pour se rassurer, entendre le son de la voix de l'autre : quand tu ne connais pas un acteur, tu lui prouves alors que c'est toi qui parles. Il a besoin de savoir que tu es un type qui sait ce qu'il veut, fiable, etc. Avec Lauryl Brossier, on n'a pas parlé du tout. J'avais fait un film avec elle (Les filles de mon pays, ndlr), je suis allé la voir dans les Landes, on s'est allongé dans l'herbe et on a lu les scènes l'une après l'autre, en cherchant à modifier les dialogues.


COUPES

  Objectif Cinéma (c) D.R.

Après la mort du père, il y avait une scène où Brigitte, l'infirmière, pleurait dans la cuisine, en quelque sorte à la place des membres de la famille, comme une pleureuse… J'aimais bien qu'on retrouve le chemin ordinaire, le rituel des larmes, par ce personnage extérieur à la famille et qui, peut-être parce qu'elle lui était étrangère, pouvait exprimer ainsi son émotion par des larmes. La mère se laissait alors prendre aussi par l'émotion, tout en la consolant. Paul entrait alors, les regardait pleurer, et sa mère lui disait " Paul ! Tu vas nous faire du café, hein Paul ? " J'ai mis du temps avant d'enlever cette scène, ainsi que quatre autres après celle-ci. J'ai privilégié les séquences silencieuses, sur la sensation juste. À la mort du père, il y avait une douceur, une sérénité un peu tendue, mais aussi une forme de majesté à certains moments, et j'ai voulu privilégier cette évidence silencieuse. Il était superflu d'apporter du pathétique à ce moment-là.


APPROCHER LE CONTE

Pour moi, Paul est venu pour donner la mort, même s'il dit qu'il est venu pour essayer d'aider ses parents. C'est pour cela qu'intervient la scène où Thierry le pousse à achever son chien blessé. Il semble alors lui dire " Aie du courage une fois, affronte le résultat de ce que tu es en train de faire. " Tout cela métaphoriquement. Je ne voulais pas qu'ils se tirent dessus. Ils n'en auraient pas été capables… On n'est pas dans un western.