Julia Faure : Garrel,
lui, suicide les autres
Mehdi Belhaj Kacem : Une
femme de la même génération que lui
a su que j'allais travailler avec Philippe, Elle m'a regardé
comme si elle avait pitié de moi, puis m'a dit :
" Philippe Garrel, c'est le dernier cinéaste
de la sublimation ". Je n'avais pas réfléchi,
mais j'ai fait un livre sur la sublimation au sens propre
du terme. C'est assez curieux.
Autre fait curieux, à la projection au Panthéon,
quand on voit l'affiche de La naissance de l'amour, la lettre
n est en rouge, et dépareille avec le reste. Et quand
il y a eu la remise du prix Décembre, Jeanne Moreau,
qui avait beaucoup aimé mon livre, est arrivée
en disant à 6 voix contre 4, Chloé Delaume
remporte le prix contre L'éloge de l'amour
de Medhi " Ben Laden ", enfin c'était
limite ça
Puis Philippe Sollers est arrivé :
" non, pas L'éloge de l'amour, L' essence
N de l'amour
"
Julia Faure : Moi
j'ai eu des échos de propos d'amis : " qu'est-ce
qu'elle doit souffrir, et en plus il y a Medhi Belhaj Kacem
"
Objectif Cinéma : Peux
tu nous parler de la genèse d'Essence n de l'amour ?
Mehdi Belhaj Kacem : C'était
une lettre destinée à une femme
Objectif Cinéma : Tu
l'as écrit pendant le tournage ?
Mehdi Belhaj Kacem : Non,
avant. Je n'ai pas écrit une ligne pendant le tournage.
J'étais à fond dans l'identification de mon
personnage
Objectif Cinéma : Au
niveau de la construction d'un personnage et de l'identification,
t'es-tu servi de ton expérience d'écrivain ?
Mehdi Belhaj Kacem : Bien
sur, on s'y retrouve un peu, mais c'est surtout le coté
vampirisant du cinéma de Philippe qui agit
Objectif Cinéma : Quelle
leçon de cinéma retirez vous du tournage avec
Garrel ?
Mehdi Belhaj Kacem : Il
a une méthode tellement particulière que l'on
déduit le reste du cinéma par rapport à
la méthode Garrel.
Julia Faure : Il
n'y a pas de leçon particulière à retirer.
C'est comme au conservatoire, il n'enseigne rien de particulier.
En fait, cela m'a appris tellement de choses que je me demande
encore ce que j'en retire exactement.
Mehdi Belhaj Kacem : Apprendre
le cinéma, et humainement, cela m'a quand même
apporté des choses.
Julia Faure : Je
crois que cela ne m'a pas apporté ce que j'aurai
espéré apprendre. Alors évidemment,
je ne vois plus le métier d'actrice comme un métier,
puisqu'il m'a considéré comme une actrice
de fonction. Cela m'a fait changer d'idée sur le
métier dont je rêvais quand j'étais
enfant. En tout cas, j'ai vécu pour Philippe pendant
tout ce film.
Mehdi Belhaj Kacem : J'ai
vécu pour moi jusqu'à un certain point. C'était
moitié-moitié
Julia Faure : Au
conservatoire, ils arrivent à travailler pour eux,
ils sont pour la plupart très individualistes. Mais
là, j'ai vraiment appris à travailler pour
Philippe et Klaus.