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Roger Corman (c) D.R.
Objectif Cinéma : En dehors de l’agglomération lilloise (festival du film court de Lille, festival gay et lesbien), le festival de Valenciennes est l’un des seuls festivals de cinéma du Nord-Pas-de-Calais…

Patricia Lasou : C’est le seul ! Le seul en tout cas avec une compétition courts et longs métrages. Dans le Nord, il n’y a pas de toute façon de villes qui se prêtent vraiment à un festival de cinéma. A Lille, il y a des rencontres, des mini-festivals, tout le circuit Michel Vermoesen (producteur et exploitant, figure de la promotion cinématographique dans le Nord, ndlr) est très bien fait. Lille est une ville déjà très riche, culturellement, et je ne vois pas ce qu'apporterait de plus un festival. Reste Le Touquet, mais ils s’orientent vers Internet, avec une compétition consacrée aux meilleurs films web. C’est donc une manifestation d'une nature très différente, bien que le Touquet soit la seule ville qui mériterait un festival de cinéma.


Objectif Cinéma : Le festival de Valenciennes est peu suivi par la presse. Il y a eu une sorte d’effet de mode avec par exemple la rétrospective Tsui Hark en 1997, et maintenant il n’y a plus que des annonces…

Patricia Lasou : Vous savez, en dehors des 3 ou 4 grands festivals français, Cannes, Cognac, Deauville, il y a de moins en moins de colonnes pour les festivals, même dans la presse spécialisée. Et on ne peut pas se comparer à ces festivals : il y a la ville, et il y a les moyens. Notre budget n’a quasiment pas augmenté depuis 13 ans, et nous sommes en permanence dans le système D. Cela en est presque hallucinant. Mais pour un festival nous sommes pas mal couverts : on ne parle pas moins de nous que des festivals de Cabourg ou Dinard.

  T (c) D.R.
Tsui Hark, c’était effectivement exceptionnel. Nous avions eu une avant-première européenne, et même la Cinémathèque Française a repris notre rétrospective. Quand Roger Corman, qui vient rarement en France, est venu, nous avons bénéficié également d'une couverture plus grande. Mais globalement, à l’exception de quelques invités marquants ou d’une rétrospective exceptionnelle, la couverture presse est sensiblement la même.


Objectif Cinéma :
Pourquoi avez-vous orienté ce festival vers la thématique " action et aventure ", des notions que vous ne cantonnez pas au genre ?

Patricia Lasou : Nous sommes parties d’un concept curieux, qui exprimait notre état d’esprit à l’époque. Il faut toujours tout replacer dans le contexte : il y a 13 ans, la ville était un désert culturel. Quand Jean Louis Borloo est arrivé. En dehors de tout contexte politique, il a amené un nouveau souffle. Nous avons cru de nouveau que cette ville pouvait faire des choses. Nous sommes parties d’une volonté d’entreprendre, qui nous a conduit à un désir d’aventure.

Ainsi dans la section compétition du festival - et cela surprend toujours - nous ne sommes pas très fidèles au genre : c’est l’aventure humaine dans son sens le plus large, qui est représentée. Dans la rétrospective nous restons, par contre, en règle générale, fidèles au genre.

Toujours dans cet état d’esprit, nous avons fondé " l’hommage au producteur " : nous voulions absolument créer ce prix parce que le producteur est celui qui, dès le départ, se bat contre toutes sortes d’embûches pour qu’un projet cinématographique voie le jour. Je crois d’ailleurs que nous avons été les premiers à le créer, il a été copié depuis, aux " César' ", et à Cannes. Nous voulions notamment démentir cette caricature du producteur avec un gros cigare, plein d’argent… C’était complètement dépassé. Beaucoup de producteurs aujourd’hui initient véritablement les choses, permettent à un film d’exister, pressentent le talent…Cela paraît évident à dire, mais ce sont des gens indispensables à la profession. Au fil des ans, nous avons honoré les plus grands producteurs français et anglais (Jeremy Thomas, Alain Rocca, Pierre Chevalier, Christophe Rossignon, Marin Karmitz).



Benoit Magimel (c) D.R.
Objectif Cinéma : Parmi les prix du festival, il y a le prix " Rémy Julienne " (le cascadeur)...

Patricia Lasou : On a pérennisé ici quelque chose d’un peu particulier. Le prix récompense un comédien aussi à l’aise dans les rôles d’action que psychologiques ; on a un peu pensé à Belmondo jeune, passant de L'Homme de Rio à Léon Morin Prêtre.

Cette année, Benoît Magimel (lauréat du prix 2002) illustre tout à fait ce talent, puisqu’il fut récompensé à Cannes pour La Pianiste, et on le voit cette semaine dans Nid De Guêpes. De même Samuel Le Bihan l’an dernier. Cette notion de l’acteur multi-facettes n’était pas évidente en France, elle commence à le devenir aujourd’hui, alors qu'elle est reconnue depuis très longtemps aux Etats-Unis.

Derrière un prix, il y a l’envie de récompenser quelqu’un. On ne se réveille pas un matin en se disant " tiens, je vais créer un prix ! ". J’aime beaucoup créer des prix, mais derrière, il faut un concept. Au début du festival, le Grand Prix était le prix " Lino Ventura " ; nous avions eu l’accord de sa veuve. Mais ce prix allait au film, et cela s’est révélé une mauvaise idée. Rester fidèle aux valeurs véhiculées par Lino Ventura ne correspondait pas par exemple à la célébration des films à la sauce Quentin Tarantino ! Nous l’avons donc abandonné en cours de route.