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Objectif
Cinéma : Huit femmes
est comme un jeu de quizz pour cinéphiles.
Arnaud de Moléron :
Toutes les références cinéphiliques viennent
de François (Ozon). Il m'a abreuvé de cassettes
qui m'ont bien sûr imprégné des décors
de ces époques, mais sans que j'en trouve un en particulier
qui me serve de référence. En revanche, un film
comme Marie-Octobre, un huis-clos avec une dizaine
de personnages, nous a aidé à estimer le volume
du salon, imaginer des points de vue, vérifier les
temps de déplacement dans l'espace de sorte que certains
plans ne soient pas trop longs. D’autres films nous ont suggéré
la façon de traiter la neige...
Mais personnellement, je ne travaille pas à l'aide
de documents filmés, mais plutôt avec des photos,
très révélatrices en détails,
et aussi beaucoup sur la mémoire des lieux que j’ai
visité et le sentiment qu’il m’en reste.
Objectif Cinéma : Le
décor adopte un parti pris délibérément
théâtral, qu'accentue la mise en scène.
Arnaud de Moléron :
Au départ, je ne savais pas qu'il y aurait ce fameux
plan final, avec le salut des actrices. Le parti pris du réalisateur
était de jouer la stylisation et non le réalisme.
La référence était le cinéma hollywoodien
des années 40 au début des années 60,
où tout était permis, où l'on sentait
l'artifice du décor, avec des nuits vraiment bleues,
une neige très artificielle.
Ici, le décor s'est conçu autour d'un élément
central : l'escalier, qui devait servir d'écrin aux
actrices qui montent et descendent. C'est la base du décor.
Pour les volumes et la géographie des lieux, la mise
en scène a dicté la distribution de la maison
: par exemple, la position de la chambre du père qui
devait être vue du salon, de l’entrée et de la
salle à manger.
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Objectif
Cinéma : Le "clou" du
décor est cette immense toile peinte.
Arnaud de Moléron :
J'ai voulu cette grande toile qui mesure une cinquantaine
de mètres. Je me suis dit que, quitte à affirmer
le décor en studio, autant se faire plaisir avec une
toile peinte qui évoque certains décors de théâtre.
A part les ciels, les découvertes de cinéma
sont le plus souvent faites de photos agrandies et retouchées,
avec parfois des premiers plans en volumes.
Par contre, il n’était pas prévu de la filmer
telle qu’elle l’a été pour le plan d’ouverture
du film ! Cette toile était conçue pour
être vue d’une certaine distance.
Objectif Cinéma : Le
paysage ne devait donc apparaître qu'en découverte
? Sans vraiment révéler qu'il s'agit d'une toile
peinte ?
Arnaud de Moléron :
Exactement. Filmée de la sorte, l’artifice du décor
est de suite dévoilé. Il nous fallait une vision
d'ensemble qui montre cette maison isolée dans la campagne.
Pour cela, j'avais pensé faire une maquette en volume,
réaliste, à l'échelle du 100è,
de la maison dans la neige, avec le chemin, le mur d'enceintes.
Pour des plans plus rapprochés, on aurait réalisé
une partie de l'entrée à une échelle
plus grande, toujours en trichant.
Finalement, au fur et à mesure que le décor
se construisait, je me suis retrouvé à faire
toute la façade de la maison. Le décor s'est
fait donc intégralement, l'intérieur et l'extérieur
sur un même plateau.
Ce plateau, malgré ses 1300 m2 de surface,
laissait peu de recul pour placer le parc entourant la propriété.
Une partie du jardin est donc en volume, puis nous avons accentué
les perspectives pour permettre au décor de "plonger"
dans la toile.
Les seules parties construites sur un autre plateau sont les
chambres des deux jeunes soeurs, celle d’Augustine (mêmes
volumes mais peinture différente) et de Mme Chanel.
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