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Thomas
Salvador : Il y a beaucoup de réalisateurs qui
ne savent pas où se situe géographiquement la
Cinémathèque ! On ne peut pourtant que
s’enrichir à voir ce que font et faisaient les autres.
Un improvisateur qui joue du piano improvise chez lui, écoute
d’autres improvisateurs, de la musique écrite etc.
Cela va enrichir son vocabulaire et contribuer à développer
son propre style. Je ne vois pas pourquoi cet apprentissage
ne serait pas valable pour le cinéma...
Je n’ai pas de rapport analytique avec les films que je vois.
Je suis avant tout un spectateur un peu boulimique. Mais je
sais qu’un gros travail se fait inconsciemment, par accumulations
d’expériences diverses.
Le jour où je devrais tourner une séquence de
dialogues dans un café par exemple, je sais que dans
un coin de mon cerveau il y en aura des centaines emmagasinées
et envisagées de manières très différentes.
Au bout du compte, je confronterai tout ce matériau
avec ma propre envie, et ce volontairement ou non. Je ne vais
pas débarquer dans un café avec la prétention
de vouloir tout créer. Tout a déjà (presque)
été fait et nous devons composer avec cette
réalité.
Objectif Cinéma : En
un sens, tu as un héritage concret qui te permet d’avoir
une prise totale sur tes films...
Thomas Salvador : Pas totale
bien sûr, et heureusement. C’est comme un ciment nécessaire
à l’édification d’un travail personnel.
Le cinéma, je me répète, est un travail
collectif. Il y a des films qui " passent "
parce qu’on va sauver le cadre et le découpage, et
cela ne tient parfois qu’au chef opérateur et à
l’assistant metteur en scène. Je connais des réalisateurs
qui ne font pas eux-mêmes le découpage !
Honnêtement on se demande parfois ce qui reste d’eux
au final. Les films qui marquent sont ceux véritablement
portés par un individu.
Si l’on compare un réalisateur à succès,
établi, et qui aurait réalisé plusieurs
longs métrages, avec un violoniste de deuxième
rang dans un orchestre de région, inconnu du public,
et bien le violoniste sera sûrement beaucoup plus érudit
sur son art que ne le sera le réalisateur. Il connaîtra
la littérature pour violon, la musique de chambre,
les concertos etc. alors que de nombreux réalisateurs
ne s’occupent de cinéma que les jours de tournage et
le reste de l’année s’en foutent totalement.
Cela dit, pourquoi pas, cela donne parfois des choses intéressantes...
Mais j’aime bien dire que le cinéma, comme tout autre
discipline d’ailleurs, se doit d’être une affaire de
spécialiste. Si je lis un bouquin, j’aime autant qu’il
soit le produit de quelqu’un dont les préoccupations
quotidiennes soient la littérature.
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Objectif
Cinéma : Comment évolues-tu
dans ce milieu économique, toi qui as avant tout un
rapport intrinsèque à la création...
Thomas Salvador : Je ne sais
pas. Je suis assez critique en ce qui concerne la manière
dont se font, ou non, les films. Mais la réalité
veut que faire des films corresponde à une économie
bien spécifique, chose à laquelle j’ai pu échapper
en produisant moi-même mon premier court métrage
(avec l’argent que j’avais touché de l’assurance suite
à un cambriolage). Je savais que je le tournerai d’une
manière ou d’une autre. Je ne voulais pas passer par
les aides, ça ne pouvait pas exister, du moins pas
pour moi. Il était important pour moi de payer pour
ce film dans tous les sens du terme. 3 ans après que
le film ait été tourné et monté,
j’ai accepté un jour l’idée de le montrer et
donc de le finir complètement.
Objectif Cinéma : Quels
ont été les apports de Local Films quant
à la finition d’Une rue dans sa longueur, court
métrage pour lequel tu as reçu le prix du festival
de Belfort ?
Thomas Salvador : Nicolas Brevière
de Local Films a permis au film de se finir, en finançant
ce qui restait à faire, notamment le report optique,
le générique, le montage négatif et le
tirage de la première copie.
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