Objectif Cinéma :
Qu'est-ce
qui a suscité ton envie de faire un film sur et avec
des femmes ?
Nicolas Brevière :
Je voulais faire un film où l'on exprimait des sentiments,
et je pensais que le meilleur "médium" pour les exprimer
était la femme, car elle a beaucoup moins de pudeur à
exprimer ses sentiments que les hommes. Comme chaque partie
du film est basée sur l'expression d'un sentiment particulier,
et qu'il fallait l'exprimer jusqu'au bout, il était évident
que la comédienne - ou la femme, en fait - devait être
le véhicule de ces sentiments, dans toute leur expression.
J'ai essayé aussi de filmer ces comédiennes de
la manière la plus féminine possible. Je voulais
que le film s'accorde à elles, et pas forcément
que le film s'accorde à moi.
Je ne voulais pas non plus que l'homme soit le tourment ou la
cause de la problème de ces femmes.
Objectif
Cinéma : Quelles étaient
des intentions dans l'ouverture de chaque partie ?
Nicolas Brevière :
On découvre un personnage dont on ne sait rien. On
va le suivre, tout en ne connaissant pas plus de choses
sur son vécu ou son histoire. Ce qui le constitue,
c'est juste l'obstacle qu'elle a à surmonter. On
ne connaît l'identité véritable de ces
femmes qu'à partir du moment où elles se confrontent
au deuil, d'une vocation ou d'une personne aimée.
C'est comme si on se posait dans la vie d'un personnage
et qu'on la regardait. On se retrouve en face de quelqu'un
qu'on ne connaît pas, et on la regarde.
Au début du film, la première femme se réveille
brutalement sans qu'on sache si elle a fait un cauchemar.
La deuxième marche de manière très
saccadée dans un parc, la troisième arrose
ses plantes dans son appartement, et la quatrième
sort d'une église. On suit ensuite ces femmes pendant
un certain temps, avant d'observer leur réaction
face au deuil vécu. En termes de mise en scène,
il fallait se demander comment on arrive dans la vie de
ces personnages, et en termes de cinéma, se poser
la question du relais, nécessaire pour passer de
l'une à l'autre. Il fallait trouver une certaine
cohérence. Au montage, j'ai donc eu l'idée
de ces plans de ciels. C'était une forme assez fluide
pour passer d'un paysage à l'autre, d'un coin de
France à un autre, d'une histoire à une autre.
Cela donne ainsi l'expression d'une continuité. La
nature est devenue aussi un personnage du film. Dans chaque
histoire, on trouve aussi bien le personnage principal et
son rapport à l'environnement. A Paris, il s'agit
du rapport à l'identité d'une fille un peu
noyée dans une ville où il y a des millions
de gens, dans une autre partie, la nature va participer
au soulagement d'une douleur, d'un deuil. Pour la ville
de province, j'avais choisi Tours car c'était pour
moi l'incarnation de LA ville de province. Je voyais mal
l'histoire de cette vocation ratée se dérouler
à Paris.
A partir du moment où l'idée, c'était
une femme, une couleur, une musique, et un univers, il fallait
essayer de mélanger tout ça pour créer
une cohérence.
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Objectif
Cinéma : Il y a un
travail intéressant sur la musique dans Plus haut.
Quels ont été tes rapports avec le compositeur
?
Nicolas Brevière :
Il est venu assez tardivement. Au moment des pré-montages
de chaque partie du film, j'avais mis des musiques connues
que j'aimais bien et qui collaient au film. Mais je ne pouvais
pas non plus me permettre d'acheter toutes ces musiques-là
car ça m'aurait coûté des millions.
J'ai fait alors appel à un compositeur qui a vu ces
différents pré-montages et qui a travaillé
alors sur la musique, en s'appuyant notamment sur ce que
j'avais envie que la musique véhicule à certains
moments. Il a réussi à systématiser
un principe que j'avais choisi inconsciemment : chaque personnage
est associé à un instrument particulier; quand
les personnages se rencontrent, les instruments se rencontrent
aussi. Le deuxième montage a été assez
difficile car j'avais monté initialement des séquences
sur une musique déjà existante, et comme on
recomposait une musique originale, cela n'avait pas forcément
le même rythme ou la même longueur. Il fallait
remonter, en fonction de la musique proposée par
le compositeur.