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Objectif Cinéma
: Quels sont vos rapports avec
les institutions culturelles japonaises, dont vous donnez
une image pour le moins " orienté " ? Vous avez contribué
à faire re-découvrir des " mauvais garçons
" du cinéma japonais, comme Yasuo Masumura Kinji Fukasaku,
ou Konuma cette année.
Gilles Boulenger
: Cela dépend du contenu des œuvres : d’une part certaines
sont défendues par des institutions comme la Fondation
du Japon, et d’autre part, comme Konuma, sont négligés
parce qu’aucun mouvement ne s’est initié autour. Lorsque
les sujets posent problème par rapport à ce
qu’ils ont envie de montrer, le mouvement est beaucoup plus
long à initier. Pour Fukasaku Kinji par contre, il
y a un vrai suivi que ce soit à Paris ou au niveau
international.
Au Japon, il n’y a pas de Fondation, pas d’institution, personne
n’assure de relais, excepté des distributeurs ou des
ayants-droits qui découvrent un intérêt
possible par rapport à l’Etrange Festival : lorsqu’il
y a une notoriété qui semble dépasser
les barrières nationales de la France pour atteindre
l’international, comme ce fut le cas pour Masumura Yasuo dont
l’œuvre a été redécouverte aux Etats-Unis
en DVD. Et il semblerait que ce qui a été initié
par l’Etrange Festival aurait eu une incidence sur ce regain
d’intérêt. Si on peut aider à ce genre
de redécouverte, tant mieux, mais dans l’absolu, on
ne peut pas dire que nous ayons des partenaires privés
japonais car ils sont pris dans une logique d’image lisse.
Ce qui n’est pas vraiment notre cas.
Objectif Cinéma
: Je pensais précisément
à l’image que vous donnez du cinéma japonais,
qui est même différente de ce qu’on en connaît
en France.
Gilles Boulenger
: Elle est peut-être trop différente. Et quant
à la France, le problème est de toute façon,
en matière de distribution, la situation est liée
à ce qui va être de l’ordre de l’actualité
immédiate. On va donc devoir très rapidement
créer des auteurs, sans pour autant avoir la certitude
qu’ils en soient réellement, parce que c’est le seul
moyen d’arriver potentiellement à fidéliser
des spectateurs par rapport à une certaine image du
cinéma japonais. Mais pour tout ce qui est un peu trop
périphérique, il est exact qu’il n’y ait pas
d’intérêt faramineux.
Cependant, un suivi est en train de se faire sur certains
auteurs, comme Fukasaku par exemple, dont les droits de tous
les films ont été achetés par un distributeur
français, suite à l’Etrange Festival. On verra
maintenant si ce sera le cas pour Konuma, ou d’autres.
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Objectif Cinéma
: Y a-t-il circulation des
programmes élaborés par l’Etrange Festival,
à un niveau international ?
Frédéric Temps
: On sait qu’il y a un suivi de certaines institutions à
l’étranger. Je pense, entre autres, au festival de
Rotterdam ou à l’American Cinematheque à Los
Angeles, qui suivent de très près nos programmations.
Il y a fort à parier que Konuma, en l’occurrence,
puisse très bien faire l’objet d’un hommage rétrospectif,
dans une des prochaines éditions de Rotterdam, ou
à l’American Cinematheque, puisqu’il s’agit d’une
réelle découverte par rapport à ce
genre, en Occident. Notre travail peut donc effectivement
amener des programmateurs à monter à leur
tour une rétrospective de ces cinéastes.
Mais cela a lieu dans les deux sens, comme pour l’hommage
à Gosha Hideo en 1994. Une rétrospective Gosha
avait eu lieu à l’American Cinematheque un peu avant
nous. D’ailleurs, on devait la faire initialement un an
auparavant, mais les copies étaient précisément
bloquées pour l’American Cinematheque. Pour Fukasaku,
ce fut un peu la même chose, puisque Rotterdam lui
a rendu hommage avant nous, et nous avons enchaîné
avec des permutations de films : nous avons pris des
films qu’ils n’avaient pas sortis et inversement ; cela
assure un certain suivi. C’est bien de savoir que, chacun
dans notre coin, on élabore une certaine cohérence
dans la re-découverte.