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Eric Clapton (c) D.R.
Objectif Cinéma : Quel a été votre parcours ?

Jana Bokova : Je suis une cinéaste qui fait des documentaires de grand format mais aussi de la fiction, mais je n’aime pas distinguer les deux genres. Je n’ai pas vraiment l’impression d’avoir une seule nationalité puisque je suis née à Prague, mais j’ai fait mes études en Angleterre à la National Film School. J’ai travaillé en Angleterre, puis aux Etats-Unis, et ensuite pour l’Angleterre en Amérique Latine, il n’y a pas un endroit ou une culture qui me soit propre, tout est mélangé. Je ne suis pas retournée en Tchécoslovaquie depuis vingt ans, je n’ai plus que ma petite-nièce là-bas, qui s’appelle aussi Jana. Je n’ai pas de liens très fort avec mon pays d’origine, et comme je voyage beaucoup…


Objectif Cinéma
: Le voyage est un élément essentiel dans votre travail, vous semblez aborder le documentaire comme un mouvement vers l’inconnu.

Jana Bokova : Je ne pense pas à m’établir quelque part : dès que je me fixe pendant six mois, ça ne va plus, j’ai l’impression d’être un peu prisonnière. Je me considère comme une bohémienne.


Objectif Cinéma : Vous parlez souvent de hasard en ce qui concerne votre travail…

Jana Bokova : Mes films les plus réussis sont ceux nés d’un hasard, et je finis par me demander s’il s’agit bien d’un hasard comme je le pense… Je crois que c’est plutôt l’instinct, je sens les choses. Je ne peux pas expliquer le choix des sujets, ce sont comme des trouvailles. Je les croise et je tombe amoureuse de mes sujets, que ce soit une ville, une famille, une culture… C’est difficile de définir le point de départ d’une passion.

(Le projectionniste fait des essais pour le film de ce soir, Sunset People. Nous nous retrouvons dans le noir, avec à l’écran, la faune et la flore du boulevard et une voie chaude qui chante rien que pour nous un jazz confortable. La projection dure cinq minutes, Jana et le projectionniste décident ensemble des réglages de son et de couleur).


  Jana Bokova (c) Cécile Giraud
Objectif Cinéma : La musique a une importance capitale dans vos films.

Jana Bokova : Oui, la musique est très importante pour moi, je n’y ai même pas pensé, ça a été automatique. Je n’utilise pas la musique comme un ornement, c’est toujours comme un dialogue, comme un élément indépendant, qui a sa propre histoire dans le film. Beaucoup de gens utilisent la musique comme une décoration. La musique m’intéresse surtout dans la fiction, elle est un fond à l’histoire, les bruits ont aussi beaucoup d’importance, les alternances avec le silence, le rythme des sons... Je ne suis pas une réaliste.


Objectif Cinéma : Pourtant, vous faites du documentaire...

Jana Bokova : Je crois que mes films sont un peu surréels, sans tomber dans la pure fantaisie. Ils entrent dans la catégorie définie pour Salvador Dali, le surréel. Quelque chose qui est réel à cent pour cent est plus que réel. L’intensité de la réalité devient surréelle. Cela tend vers la magie.


Objectif Cinéma : Vous filmez beaucoup de gens un peu marginaux…

Jana Bokova : Je suis très extrême dans mes choix. J’ai filmé des marginaux, mais ce n’est pas pour ça qu’ils étaient destinés à être marginaux, ce sont des gens qui n’ont pas réussi tout à fait à devenir ce qu’ils voulaient. J’ai aussi filmé de grandes stars, comme Anthony Quinn ou Eric Clapton. Ce sont des extrêmes.