Objectif Cinéma :
A part Un héros très discret,
situé pendant la 2nde guerre mondiale, vous n’avez
jamais fait de films d’époque.
Michel Vandestien :
Au théâtre, oui. Mais au cinéma, on m’en a peu proposé, au
vu de mon parcours - j’ai fait des premiers films ou des films
d’auteur, qui parlent d’aujourd’hui.
A chaque fois que l’occasion s’est présentée, je n’aimais
pas le scénario, ou le réalisateur. En fait, le costume ou
l’objet d’époque, ça demande un travail particulier, mais
ça ne m’intrigue pas plus que ça. Encore une fois, c’est l’histoire
qui m’intéresse, ça peut bien se passer à l’époque de Cro-Magnon.
Objectif Cinéma :
Vers quoi vous tournez-vous
pour vous inspirez ? la peinture, le cinéma, d’autres
décors ?
Michel Vandestien :
Vers le scénario, l’acteur, le metteur en scène. Ce qui me
ressource, c’est trouver du sens, comme dans la littérature.
La peinture est un bonheur, mais je ne m’y ressource pas,
même si elle m’a servi pour le dessin, la lumière… C’est un
art complètement différent du cinéma. J’y trouve non pas une
inspiration mais une motivation, un élan.
Quant au cinéma, il y a bien sur des films que j’aurais aimé
faire, comme ceux que j’ai cité tout à l’heure. Aujourd’hui,
je les revois en tant que scénographe, je les décrypte d’une
manière plus juste. Ils ont une qualité indéniable, et pourtant
rien n’est appuyé. Pour moi, le film emblématique, celui qui
résume tout, c’est 8 ½. J’y trouve tout ce que je sais
et tout ce que je ne sais pas.
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Objectif Cinéma :
Que pensez-vous de l’évolution
du cinéma depuis les années 80 ? Voyez-vous un regain
d’intérêt pour le décor ?
Michel Vandestien :
Oui, mais aujourd’hui regardez les clips ou les pubs, le
cinéma est devenu comme ça. Heureusement pas tout le cinéma.
Avant on faisait de l’art, après on a fait du commerce,
maintenant on fait du commercial. Le public est totalement
ciblé. Mais moins ici, en France, en Espagne ou en Belgique.
Tout art est inscrit dans son époque, le cinéma c’est pareil.
Les personnages des films américains sont désincarnés, ils
n’ont pas de passé, ni d’avenir. Ils boivent du coca, comme
ça on peut les voir dans tous les pays du monde, ce sont
des produits Je préfère voir le film de mon voisin qu’un
Schwarzenegger. J’aime bien quand les personnages incarnent
quelque chose qui nous est nécessaire. C’est pour ça que
je fais ces films.
Objectif Cinéma :
Si on tournait Les amants
du Pont-Neuf aujourd’hui, les lointains se feraient
en numérique.
Michel Vandestien :
Bien sûr, le cinéma peut toujours exister autrement, on
peut raconter l’histoire des Amants avec un autre support…
Mais qu’est-ce que c’est bien de travailler dans ton espace
de jeu ! Je n’ai rien contre les effets spéciaux, les
trucages ont toujours existé au cinéma. Ce que j’aime, c’est
qu’il y ait un espace à accomplir, avec un rapport physique,
comme au théâtre.
Dans le cinéma, j’aime bien le travail des autres, il m’a
appris à savoir qui j’étais. Aujourd’hui, ce n’est plus
le cas, il y a moins de réflexion commune. On travaille
dans des non-lieux, devant des écrans bleus. Non plus avec
des individus, mais avec des professions. On devient spectateur
de nos métiers.