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Objectif Cinéma :
Des trois personnages, Isabelle,
Pollux, Irène, lequel vous a le plus apporté
dans l’apprentissage de votre métier ?
Cécile de France :
Pollux est un petit rôle, c’est un personnage fantasmagorique,
donc moins présent à l’écran, physiquement.
Mais, à chaque fois que Pollux apparaît, ça
doit être très bien mené au niveau de
l’intensité du jeu. En cela, c’est un personnage intéressant.
En ce qui concerne Irène et Isabelle, j’ai également beaucoup
appris : c’était la première fois de ma vie
que je jouais des personnages comme ceux-là ! Les deux
personnages m’ont ouvert l’esprit, dans le sens où
j’ai découvert certaines choses liées à
l’homosexualité et au célibat. Pour le rôle
d’Isabelle, travailler avec Cédric Klapisch, qui est
pour moi un maître, a été formidable…
Il est tellement détendu dans son art, alors qu’il
pourrait être si suffisant… Pour résumer, chaque
personnage vous fait gravir une marche supplémentaire.
Une nouvelle expérience, même à priori
mauvaise, ne vous fait pas redescendre cette marche, vous
la montez quand même… A moins qu’il n’y ait aucune rencontre
entre le personnage et l’acteur ou l’acteur et le réalisateur.
Dans ma toute petite carrière, cela ne m’est pas encore
arrivé, mais peut-être que ça m’arrivera
un jour. A ce moment-là, on verra … Quoi qu’il
arrive, chaque prestation, même s’il s’agit d’un tout
petit rôle dans une pièce de théâtre
pour dix personnes, permet de toute façon un travail,
une réflexion.
Objectif Cinéma :
Pour A + Pollux, vous
n’étiez pas convaincue par le caractère du personnage
que vous représentiez ? Le film est pourtant une franche
réussite.
Cécile de France :
Oui. Ce film a reçu le prix du Public à Namur
[au Festival International du Film Francophone, NDLR
] et je suis vraiment triste qu’il n’ait pas eu le temps de
vivre en salles, comme il le méritait. J’avais l’envie
de jouer Pollux, mais j’attendais de voir ce que Luc Pagès,
le réalisateur, voulait vraiment faire : ce film
était tourné en vidéo, post-synchronisé
du début à la fin et je n’étais pas très
touchée par le texte. Avant les essais, la première
chose que j’ai dite à Luc c’est : " Je
ne sais pas qui a écrit le texte, mais ce n’est pas
terrible ! " Là, il m’a répondu
que c’était lui, qu’il y travaillait depuis quatre
années. Je lui ai alors demandé ce que cette
histoire signifiait, on en a discuté, il a répondu
à chacune de mes interrogations. Peu à peu,
j’ai assimilé sa façon de voir Pollux. Apparemment,
je correspondais vraiment au personnage, et dès les
premières répétitions, ça s’est
véritablement très bien passé.
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Objectif Cinéma :
Dans L’Auberge Espagnole,
Isabelle a séduit tout le monde, très vite…
Cécile de France
: Effectivement, mais le casting autour d’elle est chouette !
Ce film a été improvisé, on tournait
l’après-midi alors qu’on avait les dialogues le matin
même, parfois assez tard... Cédric Klapisch est
très fort dans l’instant, pour filmer, diriger rapidement.
Belle expérience ! Le tournage s’est déroulé
de façon très détendue, dans le plaisir,
comme pour Irène, d’ailleurs.
Objectif Cinéma :
Pour Irène, votre
performance de comédienne est impressionnante. Il semble
que vous ayez énormément travaillé le
texte et les attitudes du personnage. Pourquoi ?
Cécile de France :
Le travail a été long, oui. C’est un personnage
très difficile à " faire passer ".
Irène est profondément malheureuse, mal dans
sa peau, dans ses habits. Elle n’a pas conscience de son corps
et elle est aussi bien loin de son cœur. Il faut qu’elle vive
cette déception amoureuse avec Lucas pour se rendre
compte que l’ " Autre " est là,
que la vie est juste à portée de mains :
cette vie, c’est François qui la symbolise. François
fait donc partie de la vie, Lucas fait partie du monde virtuel,
celui d’Internet. Irène met du temps à le réaliser
parce qu’elle vit aussi dans un monde de fantasme, en désaccord
avec ce qu’elle est réellement. François l’aide
à revenir dans le monde des sensations afin qu’elle
éclose comme une fleur. Mais il faut bien dire que
ce personnage, bien qu’il n’ait que trente ans, paraît
très âgé, à l’opposé de
celui de la jeune étudiante de vingt ans que j’incarne
dans Haute Tension. J’espère d’ailleurs que
je suis crédible au niveau de l’âge, c’est toujours
un peu dangereux ces décalages…
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