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  La Veuve de St-Pierre (c) D.R.

Objectif Cinéma : Quand vous débutiez, quelle était la tendance dans le décor de cinéma ?

Ivan Maussion : J’ai commencé à une période où on tournait beaucoup en décors naturels. Les directeurs de production, qui étaient souvent jeunes, avaient peur de mettre les pieds dans un studio. Ils en avaient l’image d’une tradition, avec l’obligation d’acheter sur place des matériaux chers, d’embaucher une grosse équipe avec de nombreux assistants, un chef constructeur, etc. Pour eux, le studio était synonyme de beaucoup de dépenses.

Grâce à certains décorateurs, dont j’espère faire partie, on arrive de temps en temps à prouver le contraire aux productions : qu’en studio on travaille mieux, on gagne du temps, donc de l’argent.

Par exemple, il vaut mieux consacrer du temps à la préparation du film sur le plan artistique que de passer des dizaines d’heures en voiture à repérer des décors dans lesquels on ne pourra pas faire ce que l’on veut. Et bien sûr, on maîtrise mieux le son, la lumière, les acteurs sont dans de meilleures conditions, etc.

J’aime le cinéma, les décors, et pour moi le studio est une planète. A force d’expérience, je pense bien savoir tirer parti du travail en studio, que ce soit dans la pub ou le long-métrage.

Pour La veuve de St-Pierre, des amis ou des professionnels m’ont demandé : « Alors, vous avez tourné entièrement sur place ? ». En fait, les deux tiers du film ont été tournés aux studios d’Arpajon où nous étions seuls pendant plus de quatre mois, en occupant cinq plateaux. Patrice Leconte interdit les reportages et les photos sur ses tournages - pour lui, le décor doit exister à la sortie du film - si bien que personne ne nous a vu. On y a tourné tous les intérieurs et même la cour de la caserne sous la neige.

A St Pierre, on a fait les extérieurs, construit le café et le village de pêcheurs. Et comme la neige n’a pas été au rendez-vous, on a du le démonter entièrement - seize maisons pas prévues pour être démontées ! - le transporter et le remonter au Canada, à trois milles kilomètres de distance, tout ça en une semaine…


Ridicule (c) D.R.

Objectif Cinéma : Comme La veuve de Saint-Pierre, Ridicule est un film d’époque, cette fois la France du XVIIIème.

Ivan Maussion : On a reconstitué cet univers : le XVIIIème, la cour de Versailles, dans divers endroits de la région parisienne. Il a fallu bricoler, c’est un mélange de studio et de décors naturels, de châteaux qu’il a fallu aménager, remeubler.

Sur le grand plateau de Boulogne, qui est aujourd’hui détruit, on a construit plusieurs intérieurs : la bibliothèque, les bureaux du généalogiste, du gouverneur… et aussi une partie de la salle de bal de Vaux-le-Vicomte car il fallait faire des raccords après le tournage dans le vrai château. A Versailles même, il n’y a qu’une seule scène dans le parc.

Il y avait une grande énergie artistique sur Ridicule, et la lumière de Thierry Arbogast est pour beaucoup dans la qualité finale. A la soirée des Césars, je suis parti avec un César dans les mains, et Patrice aussi. J’étais vraiment heureux pour lui, car il y a un consensus favorable sur ce film, comme sur Le mari de la coiffeuse et Tandem.


Objectif Cinéma : Pour la scène de repas entièrement éclairée à la bougie, comment avez-vous travaillé le décor ?

Ivan Maussion : Pour cette séquence du dîner, qui a duré deux jours entiers, la consigne de Patrice était : pas un câble, pas une ampoule dans ce décor. C’était éclairé uniquement à la lumière naturelle de  nuit : bougie et lampe à huile. J’étais d’accord à 100%, cela donne une poésie supplémentaire. Pour le décor, il fallait en mettre plus que dans la réalité : plus de bougies bien entendu et plus d’éléments, plus de brillances, plus d’ombres.