Objectif Cinéma : Quelles
sont ses indications pour les intonations par exemple ?
Grégori Derangère :
C’était surtout beaucoup de vivacité dans le rythme. Comme
le dit Jean-Paul Rappeneau lui-même, Bon voyage est un
exercice de rythme sur deux heures. Rien ne s’arrête, il n’y
a pas de blancs, et quand une scène se termine, l’autre est
déjà commencée.
Objectif Cinéma : Il
mime les scènes ?
Grégori Derangère :
Oui, énormément. Ces personnages-là sont toujours dans une
action, ils se croisent, l’un est un peu paumé, l’autre a
la trouille, etc…Tous les personnages gardent du début à la
fin cette sorte d’agitation.
Objectif Cinéma :
Même le figurant au fond du plan bouge
aussi !
Grégori Derangère : Oui,
oui. Rappeneau prend aussi un grand plaisir à régler tout
ça. On fait parfois quinze fois la prise parce qu’un type
au fond n’a pas fait ce qu’il fallait !
Objectif
Cinéma : Comment s’est
tourné la séquence de bagarre dans l’hôtel ?
Grégori Derangère :
Jean-Paul avait peur car il se demandait si je pouvais assurer
physiquement la scène ou s’il fallait me remplacer par un
cascadeur et faire alors des plans plus larges, différents
de ce qu’il avait prévu au départ. On a étudié la séquence
avec des cascadeurs pendant une demi-heure, et le lendemain,
on a fait deux prises sur la première partie et deux prises
sur la seconde, celle où je casse la vitre, etc. Tout s’est
bien passé. Quand il faut courir, bousculer trois personnes
tout en parlant, et faire attention au travelling, etc,
je m’en sors bien. Si je dois jouer assis avec pas mal de
dialogues, c’est plus « costaud » pour moi !
Objectif
Cinéma : Prenons aussi
comme exemple la scène où tu montes l’escalier de l’hôtel
en faisant un petit signe de la main : geste infime
mais très burlesque, qui provoque l’éclat de rire. Comment
t’a-t-il dirigé pour cette scène ?
Grégori Derangère :
Il m’a montré le trajet en me disant de faire un petit signe
et une sorte de sourire de politesse. On a juste fait deux
ou trois prises. Mais pour cette scène, il a insisté pour
que j’en fasse moins. Il souhaitait que je reste dans le
registre qu’il m’avait montré auparavant. Mais la prise
qu’il a choisie est peut-être celle où j’en fais un tout
petit peu plus que ce qu’il voulait. C’est aussi l’un des
moments du tournage où il m’a laissé le plus libre. On se
dit toujours que ce genre de scène n’est pas très importante,
mais finalement ça fait des petits moments chouettes.
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Objectif
Cinéma : Est-ce qu’il lui
arrivait de te dire que tu en « faisais un peu trop » ?
Grégori Derangère - Il voulait que ce personnage de Frédéric
soit tout le temps pris dans une action. Dès que je me détendais
dans les scènes avec Virginie, il n’aimait pas du tout,
il fallait que le personnage soit plus tenu, un peu sombre
dans ses pensées. Il ne voulait pas qu’on puisse avoir l’impression
qu’il s’entende bien avec le personnage de Virginie, voire
qu’il essaye de la draguer. Je me suis appliqué à faire
ce qu’il me demandait, mais un personnage est toujours un
assemblage entre la volonté d’un réalisateur et ce qu’en
fait naturellement un acteur. Ce n’est jamais vraiment la
même chose.