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  Aram (c) D.R.

Objectif Cinéma : Il y a eu des répétitions ?

Robert Kéchichian : Pas du tout. On a fait des essais entre Méliné et Aram. Aram n'a pas fait d'essai. Il y a eu un essai de Serge Avédikian, mais ils n'ont jamais travaillé ensemble. Moi j'aime bien aussi le saut dans l'inconnu, le saut dans un lieu, celui de l'espace dans lequel on tourne.


Objectif Cinéma : Du coup, c'était très spontané ?

Robert Kéchichian : C'était spontané mais très dirigé.


Objectif Cinéma : La musique d'Aram est très marquante, très présente. Quelle utilisation avez-vous voulu en faire ? Car il y a aussi beaucoup de scènes sans musique. Comment s'est opéré le choix des scènes avec ou sans musique ?

Robert Kéchichian : Pendant toute l’écriture du scénario, j'étais hanté par cette musique arménienne traditionnelle. Comme je le disais dans le dossier de presse (2), on dit d'une musique qu'elle est traditionnelle quand elle court avec le temps et qu'elle devient mémoire. Et la musique arménienne est une longue plainte qui se souvient du drame et des souffrances du peuple arménien. C’était la base de ma réflexion musicale et, pour le reste, tout à fait franchement, c'est au moment du montage que s'est opéré le choix de la musique, avec la chef monteuse qui me suggérait des choses…


Aram (c) D.R.

Objectif Cinéma : Vous dites d'Aram que c'est un film noir. D'ailleurs vos choix d'éclairages vont nettement dans ce sens : la plupart des plans sont soit très sombres soit très brumeux, il y a beaucoup de scènes de nuit, les scènes d'intérieur sont très peu éclairées ou les décors sont très sombres… Comment avez-vous travaillé cela avec votre directeur de la photo ?

Robert Kéchichian : Aram est plus un film sombre qu’un film noir. Pour prolonger ce que vous dites, une dame m’a dit en sortant de la projection : « Je n'ai pas vu un film en couleur, j'ai vu un film en noir et blanc ». Le travail de Laurent Dailland, mon chef opérateur, a été d’autant formidable que nous n’avions que 14 millions de francs pour faire le film. Nous l’avons tourné en huit semaines.


Objectif Cinéma : C'est pour cela que vous avez tourné beaucoup de scènes de nuit ?

Robert Kéchichian : Non, tout était prévu. En plus, les scènes de nuit prennent toujours beaucoup plus de temps à tourner. Nous étions dans une contrainte économique, mais nous avions bien entendu envie de préserver la dimension artistique. Nous avons donc tourné en Super 16 qu'on a gonflé en 35 et dans un format Scope. Par contre, nous avons étalonné en numérique, ce qui a permis de temps en temps de faire des raccords lumière très difficiles sur des séquences qui n'étaient pas tournées le même jour et qui avaient une lumière différente.


  Aram (c) D.R.

Objectif Cinéma : Quelles sont les possibilités supplémentaires de l'étalonnage numérique ?

Robert Kéchichian : Avec le peu de matériel dont il disposait, Laurent Dailland aurait refusé de tourner par exemple la scène dans la salle de mariage, s’il n’avait pas su à l’avance qu’il pourrait compenser plus tard en l’étalonnant en numérique


Objectif Cinéma : Les cadres sont extrêmement soignés, avec une grande sobriété. Comment avez-vous travaillé, là aussi, avec le directeur de la photo ? Ce sont ses idées, les vôtres, les deux ?

Robert Kéchichian : Ce sont les deux. Évidemment, au départ ce sont mes idées. Je ne voulais pas d'effet de caméra gratuit. J'avais envie de me frotter à quelque chose de l’ordre de ma culture cinématographique. Les films les plus beaux sont ceux où le cadre est tellement beau qu'on l'oublie tout en le remarquant. Et puis on travaille sur l'essentiel, sur la quintessence du plan, on ne met pas une grosse amorce, on ne met pas un long travelling... Il faut respecter le sens de l'histoire. Je voulais un film épuré, une sobriété du cadre, où ce qui se dit, ce qui se voit, demeure l'essentiel.