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Objectif Cinéma :
Comment travaillez-vous avec eux ?
Avez-vous des idées très précises sur la musique que vous
voulez entendre ?
Cédric Klapisch : Ça a été
différent pour chacun des films. Avec Philippe Eidel, on n’a
pas parlé de style musical, je lui ai juste parlé des artistes
que j’avais contactés, Bashung, Michel Portal…Cela a donné
des indications à Philippe sur l’univers sonore qu’il fallait
trouver. Ensuite, c’est beaucoup en parlant du film. C’est
vraiment lui qui a inventé cette espèce de style musical méditerranéen,
ce thème qui revient dans le film… Ça peut être espagnol,
juif, arabe… Cette musique est assez réussie dans son côté
très métissé, très mélangé, qui porte surtout une idée de
tristesse drôle et d’ironie. Ce thème principal m’avait épaté,
j’ai d’ailleurs l’impression qu’une musique de film réussie,
c’est une musique qui contient des images d’émotions ou des
émotions en images.
Sur Peut-être, j’avais besoin de quelque chose d’électro-acoustique
et de moderne. Comme Loïk Dury est avant tout D.J, je me suis
dit qu’il allait fabriquer plutôt une musique liée davantage
à l’idée du sampling et du collage. Comme je suis quelqu’un
de très éclectique dans mes goûts, je lui ai fait entendre
des morceaux de musique classique, du Duke Ellington, du Bach,
du rap, etc. A force de mélanger tout ça, il est arrivé au
thème qu’on entend dans le générique du début. On y entend
un accordéon à la Piaf mais aussi du reggae, du funk, de la
techno : un mélange très réussi de genres musicaux qui
se marient bien ensemble. Au départ, ce générique était une
espèce de bouillie immonde ! C’est à force de travailler,
qu’est arrivée une mélodie, qu’est apparu un équilibre de
toutes sortes d’échos et de références.
Dans L’Auberge espagnole, Loïk a aussi très bien utilisé
l’espèce de confusion que j’avais dans ma tête. Il arrive
toujours à fabriquer une seule chose à partir de toutes mes
idées.
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Objectif Cinéma :
C’est curieux d’ailleurs la différence
de sensations qu’on peut avoir quand on écoute vos BO seules,
sans images et quand on les entend dans « l’enceinte »
de vos films…
Cédric Klapisch : Oui j’imagine !
J’ai d’ailleurs tendance à incorporer aux BO des musiques
qui sont sous-mixées, comme s’il s’agissait d’une petite radio
qui passait en fond sonore dans le film. Par exemple dans
L’Auberge espagnole, j’ai été très content qu’on mette
certains morceaux en intégralité dans la BO, comme celui de
Mala Rodriguez (La Cocinera), une musique que j’entendais
beaucoup dans les magasins à Barcelone, que j’avais vraiment
envie de mettre dans le film, mais qu’on y entend peu finalement.
Cette musique contient « l’hispanicité » actuelle.
C’était important qu’elle soit dans la BO.
Objectif Cinéma : Il
y a aussi souvent, curieusement, des plages de musique classique,
la valse de Rubinstein dans L’Auberge espagnole, pas
forcément hispanique, puis Raimondi chantant Tosca dans Ni
pour ni contre (bien au contraire), pourquoi ?
Cédric Klapisch : La valse,
c’est le mouvement qui m’intéressait, quant à Tosca, c’est
le côté violent, un peu rouge que je voulais utiliser…J’ai
toujours mis du classique dans mes films, c’est une façon
de dire que la musique classique n’est pas plus grande que
les autres, il y a de grands morceaux de jazz, il y a de grands
morceaux de variétés. J’essaye de contredire cette hiérarchie
débile. Dans Ni pour ni contre (bien au contraire),
il y a aussi du Chet Baker. Pour moi, Chet Baker n’est pas
moins important que Bach ou que les Beatles.
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