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Objectif Cinéma :
Il y a l’idée de rompre la solitude
Alain Guiraudie :
Basile passe son temps à quitter les lieux où il va, mais
il est aussi constamment en rapport avec les gens. L’Autre
est quelqu’un qui est profondément emmerdant, mais l’Autre
c’est avant tout et aussi une chance. Johnny Got s’occupe
beaucoup de ce qui l’entoure, voire de ce qui ne le regarde
pas. Il renoue avec l’idée du héros. Les trois personnages
partent de moi, de chacune de mes préoccupations, de ce
que je veux être, de ce que j’ai pu être.
Objectif Cinéma :
Tu parles de héros et dans
ton film, ce sont de tous petits actes héroïques…
Alain Guiraudie :
On est dans le héros foireux. J’ai toujours aimé le côté
épique, mais en même temps, on sait bien que ces trois personnages
sont quand même des tocards de base. C’est peut-être en
les réunissant que ça donne quelque chose…
Objectif Cinéma :
Pas de repos… serait un film sur la dignité ?
Alain Guiraudie :
Oui. Comment être dans ce monde… De la dignité de l’individu.
Bon, je ne sais pas si ça relève de la dignité, mais je
reviens toujours à ma problématique un peu sociale :
tu n’es qu’une sombre merde si tu te replaces dans l’histoire
du monde, mais tu es quand même important. N’importe qui
est important.
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Objectif Cinéma :
Comment s’est déroulé le
travail avec le chef opérateur sur la lumière et les couleurs
flamboyantes ?
Alain Guiraudie :
J’aime beaucoup m’occuper de l’image, des couleurs, des
costumes. Le cadre est la seule chose que l’on fait vraiment
ensemble avec le chef opérateur, on en discute vraiment
beaucoup. On parle beaucoup de la lumière ensemble, mais
je ne peux pas dire alors que je le dirige vraiment. On
a un goût commun pour les couleurs chaudes, on voulait des
nuits américaines, des choses comme ça.
Objectif Cinéma :
Quelles sont tes références
à ce niveau ? Sur quels matériaux travailles-tu ? Des
cartes postales, des photos, de la bande dessinée, des artistes
peintres que tu aimes ?
Alain Guiraudie :
Je montre des photos et des peintures à Antoine Héberlé
(chef opérateur), et même parfois des dessins de moi. Mon
imaginaire est un joyeux bordel. Je peux tomber sur des
photos, des dessins qui me plaisent, je les découpe et je
les montre à mon chef op. Ça permet de communiquer avec
l’autre. Il y a cette idée de ne pas transformer le réel,
mais d’en extirper ce qu’il y a de beau et de le magnifier,
de le sortir de la grisaille. Il y a des choses belles qu’on
ne voit pas, comme un chantier de la DDE au printemps ou
sous la neige, il y a de jolis bleus, des oranges… Il suffit
d’être attentif. Il y a des choses que j’aime transformer.
Les voitures sont davantage issues des années 70 que de
notre époque. Le film se situe beaucoup entre deux époques.
Le film est tourné aujourd’hui, alors que j’ai presque 40
ans, mais il parle de mes 20 ans, dans les années 80.