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Objectif Cinéma :
Pouvez-vous me parler de vos choix de directeur artistique,
qui ont contribué au rajeunissement de cette œuvre ?
Xavier Kawa-Topor :
Dès le départ, nous souhaitions confier la composition musicale
à Jean-Marie Sénia parce qu’il y avait un bel alliage entre
ces deux univers. Sénia est un compositeur de l’image :
il fait beaucoup de musiques de film, il improvise aussi
sur les muets. D’autre part, il a une culture musique à
la fois moderne et classique. Comme Staréwitch, il peut
reproduire l’ambiance d’un bouge parisien, convoquer le
souvenir de Joséphine Baker, ou composer une trame liée
à Debussy ou Rachmaninoff. L’idée était d’établir une dramaturgie
musicale sur l’ensemble du film. Ensuite se posait la question
de la voix off. Lorsqu’on a fait l’inventaire des cartons,
on s’est rendu compte qu’il fallait changer le texte. D’une
part, le français n’était pas la langue maternelle de Staréwitch
et les textes comportaient certains archaïsmes qui alourdissaient
la trame visuelle du film. D’autre part, tous les cartons
n’étaient pas d’origine et puis les jeunes enfants ne peuvent
pas lire les sous-titres. Pour toutes ces raisons, nous
avons décidé d’écrire de nouveaux textes. J’ai effectué
des recherches et ce qui me semblait le plus satisfaisant,
c’était le travail fait par Charlie Chaplin après l’avènement
du parlant lorsqu’il a réadapté la Ruée vers l’or
en supprimant les cartons et en réécrivant un commentaire
en voix off. Cela permettait de conserver la poétique du
muet. Je me suis donc calé là-dessus pour travailler les
textes, en ayant régulièrement le point de vue et les compléments
de Jean Rubak, qui a travaillé sur les animations originales
entre les trois courts métrages.
Ceci m’amène au troisième parti pris, qui était de lier
les trois films, sans pour autant faire un patchwork qui
demanderait un effort aux enfants. C’est très difficile
de se projeter dans une histoire, d’en sortir pour se réinvestir
dans un nouveau récit. On a donc cherché à maintenir une
tension dramaturgique sur l’ensemble du film, qui devait
passer par la musique et la voix off, mais aussi par des
transitions visuelles qui lient les trois films. Ce travail-là,
et la retouche des images très ponctuelle rendue nécessaire
par le retrait des cartons, ont été confiés à Jean Rubak,
qui nous a rejoints au début de l’année. Cet animateur a
une approche très particulière parce qu’il travaille à partir
d’un matériau préexistant, c’est-à-dire qu’il anime des
dessins qui existent déjà. Mais ce n’est pas un faussaire :
il est à la fois capable de gérer un patrimoine et de trouver
le chemin d’une expression d’auteur. Il se démarque de façon
très claire de Staréwitch, et ajoute sa propre patte dans
une œuvre originale.