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Ladislas Staréwitch (c) D.R.

Objectif Cinéma : Staréwitch semblait fasciné par le Moyen-Age...

Xavier Kawa-Topor : Je pense que le Moyen-Age l’intéressait moins en temps que période historique, mais pour ses contes. Ce qui l’intéresse dans le Roman de Renart, c’est le registre littéraire. Dans l’Horloge magique, ce sont les archétypes du conte, qui sont plus moyenâgeux que médiévaux. L’Horloge magique met en scène une représentation du Moyen-Age telle qu’on la trouve dans les contes de fées. Staréwitch a une vraie fascination pour les contes et il a même écrit à ce sujet. Il explique que le conte est un genre qui atteint une sorte de perfection parce que ces récits ont été sans arrêt réécrits et épurés en fonction de l’écoute des enfants. Leur forme finale est parfaite, comme une pierre polie sans arrêt par l’eau d’une rivière. On retrouve cela dans l’Horloge magique avec tous les archétypes de la Belle au bois dormant, le dragon, le fou du roi, et puis il s’amuse et introduit un chevalier alcoolique... Dans la Petite parade, on est à nouveau dans un conte écrit par Hans Christian Andersen (Le Petit soldat de plomb, ndlr) et on est aussi dans le domaine des animaux par le biais des jouets. Les jouets, comme les contes, sont des artefacts parfaits à force d’être dans les bras des enfants.


Objectif Cinéma : Il était aussi capable d’inscrire sa patte à une forme traditionnelle de récit, parce que l’Horloge magique est un scénario original. Quels aspects de sa personnalité infuse-t-il dans ses films, par exemple quand il inscrit en guise d’épilogue un carton intitulé « Immoralité » ?

Xavier Kawa-Topor : Staréwitch est à la fois moral et très indépendant. L’Horloge magique a des emprunts bibliques (un diable, un serpent, une pomme) mais cela vient de quelqu’un qui a fait l’école buissonnière et qui garde cette approche : Staréwitch organise sa morale selon sa propre vision des choses. Ce qui est important, c’est que c’est lui qui fixe les règles, comme à la fin du film avec la princesse qui mange la pomme - le fruit défendu par excellence - et en arrière-plan, les deux personnages oniriques qui s’embrassent de manière très libre.

Je ne veux pas faire de la psychanalyse à deux sous, mais l’histoire de Nina dans l’Horloge magique est celle d’une jeune fille qui se rebelle contre son père, arrête le mécanisme régissant tout son univers bien huilé et va vivre sa propre vie. Elle arrête le conte, le change et prend la place de la princesse pour sauver son chevalier. En d’autres termes, l’adolescente décide d’arrêter de faire partie de l’univers de son père. C’est d’ailleurs le dernier film de Staréwitch dans lequel apparaît Nina Star. Ce qui est significatif, c’est que Staréwitch lui-même montre le départ de Nina et son propre accord. Une fois qu’elle casse l’horloge, il essaie encore de la faire entrer dans un univers plus large, celui des rêves et de la nature, dans lequel il réconcilie tout le monde. Il acquiesce au fait que Nina croque la pomme avec son chevalier. C’est vraiment le grand ordonnateur, presque un démiurge.