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Paule und Julia  (c) D.R.
Objectif Cinéma : Et après ?

Lars Löhn : Ensuite, après avoir fait pas mal de groupes, je suis entré à Podevil, une maison financée par l'Etat pour promouvoir la musique expérimentale. A 20 ans, c'est intéressant, on a beaucoup de testostérone ! Mais au bout de deux ou trois ans passés à faire du bruit ça devient énervant. L'avant-garde, c'est un milieu très conservateur. Dès que vous voulez faire de la pop, on se moque de vous. Alors que des artistes comme Madonna ou Björk travaillent avec des groupes de musique expérimentale, qui sont pour certains issus de la scène allemande. Les musiciens expérimentaux ne se rendent pas compte que faire de l'avant-garde tous les jours pendant 20 ans, ça ne rime à rien. Mais pour eux ce qui les intéresse, c'est de parler de la musique, de penser la musique, et au final pas vraiment d'en faire, en tout cas surtout pas de toucher avec elle plus qu'une toute petite minorité.


Objectif Cinéma : C'est à ce moment-là que vous vous êtes tourné vers le cinéma ? Par déception ?

Lars Löhn : Non, c'est intervenu plus tard. D'abord, j'ai travaillé avec une “ light artist ”, Gunda Foerster, notamment pour la mise en scène du Festival de littérature sur la Postdamer Platz. Mais elle avait une vision très sérieuse de l'art, sans aucun humour. Elle ne réalisait des œuvres qu'avec la couleur blanc et au bout d'un an et demi de collaboration, j'en ai eu marre de tout ce blanc ! C'est là que j'ai décidé de me tourner vers le cinéma. J'avais fait des études de littérature et j'étais passionné par la musique, j'ai trouvé que le cinéma était le meilleur moyen de concilier les deux. Et puis contrairement à ce que pensent beaucoup de compositeurs, écrire une musique de film est quelque chose de très créatif. Une majorité de compositeurs refusent de travailler pour le cinéma à cause des contraintes de fabrication - il faut aller vite avec peu de moyens -, et aussi de création - dans un film, on ne peut pas développer plus d'un thème. Moi je pense l'inverse. Contrairement à eux, je ne conçois pas la musique comme quelque chose d'absolu. Je pense qu'adapter la musique à l'image peut être également de qualité.


  Mozart (c) D.R.
Objectif Cinéma : Justement comment concevez-vous la musique de film ?

Lars Löhn : Ma musique, c'est un mélange de technique expérimentale et de compositions traditionnelles. Ce que j'essaie de faire c'est de composer une musique qui soit un compromis entre les structures amorphes de la musique concrète et les structures mélodiques de Mozart ou Bach par exemple. Je veux garder le côté surprenant de la musique concrète. Elle met en place des sonorités qu'on ne connaît pas et donc qui nous accroche plus l'oreille que des arrangements harmoniques classiques. Mais je veux gommer les aspects généralement agressifs de ce type de musique. J'essaie de rendre les structures dissonantes plus douces pour rendre la musique concrète plus accessible, que ce soit moins de l'art brut, que l'auditeur prenne du plaisir à l'écouter, qu'il ne soit pas mis d'emblée sur la défensive.