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Objectif Cinéma :
Comment préparez-vous un film ?
At Hoang : Je prends
le temps de dessiner tous les décors, pour montrer ce que
suggère le scénario. Ces documents, des ambiances, des perspectives,
me permettent de travailler avec les metteurs en scène.
Quand on préparait avec Jean-Jacques Annaud, il me parlait
et à la fin de sa phrase, il y avait son dessin. Il n’en revenait
pas. J’ai développé cette technique, un peu à la manière d’un
story-boarder. Après, chez moi, je passe aux volumes, je précise
l’atmosphère : un objet, une tâche de lumière. C’est
ma méthode.
Objectif Cinéma : Après
L’amant, vous enchaînez avec un autre film à gros budget :
Germinal.
At Hoang : Claude
Berri, qui avait produit L’amant, m’a appelé un samedi
soir pour me donner le scénario de Germinal. Dès le
lendemain, on est parti en repérages et je lui ai fait des
esquisses qui l’ont convaincu. Germinal a représenté
pour moi un an et demi de travail, préparation et tournage
compris. Pendant plusieurs mois, on a repéré et visité toutes
les mines de France, dont les plus anciennes datent de 1930.
J’ai longuement visité les écomusées, les bibliothèques, consulté
les documents contemporains et surtout antérieurs à Zola.
Car le Voreux, c’est une mine de 1840, en bois, pas du tout
contemporaine de Zola ou de l’architecture métallique du XIXème.
Il fallait donc entièrement recréer le Voreux en décor. J’ai
dit à Claude Berri : le décor doit être un personnage,
au même titre que les comédiens. Si le décor ne joue pas,
le film ne passera pas. On ne pouvait pas se contenter de
simuler l’atmosphère d’une mine, car le scénario comportait
des scènes spectaculaires. : explosions, inondation des
galeries,…Il fallait y croire, et pas seulement sur le plan
psychologique. Près de 80 % des décors du film ont été entièrement
construits. Devant la masse de travail, la production a ensuite
engagé Christian Marti. Il a travaillé dans la ligne définie
pendant la préparation, mais comme un décorateur à part entière,
pas comme un décorateur exécutant.
Objectif Cinéma :
Les galeries souterraines sont le
lieu le plus dramatique de l’action. Comment ont-elles été
réalisées ?
At Hoang : Nous avons
aménagé un hangar (dont il a fallu sonder et stabiliser le
sol) de 6000m2 à Valenciennes, dont 2000m2 de piscine, avec
tout un système de recyclage et de chauffage de l’eau, qui
sinon aurait été gelée.
Les plafonds des galeries sont en moulage de résine, mais
les parois en caoutchouc. La résine ou le plâtre auraient
été trop durs, les comédiens auraient pu se blesser. Donc,
on a agrafé plusieurs peaux en caoutchouc, elles-mêmes auparavant
moulées sur de la pierre et qui en imitaient la rugosité,
le matiérage.
Pour la taille, il fallait que le geste soit crédible. Quand
Depardieu attaquait à la pioche, cela ne pouvait être que
des blocs de vrai charbon. Avec l’aide de la société des Charbonnages
de France, on en a fait venir de la seule mine à ciel ouvert,
située dans le centre de la France. Germinal présentait
des aspects techniques très spécifiques : ingénierie
béton, machinerie…Tous les effets spéciaux ont été réalisés
en direct, l’inondation des galeries, l’explosion du monte-charge
qui était une maquette de plusieurs mètres de diamètres. Un
décor comme 7 ans au Tibet était beaucoup plus grand,
mais il ne comportait pas tous ces défis techniques.
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