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Objectif Cinéma :
Qu’est-ce que l’aide au programme
du CNC, qui a été créée il y a quelques années, a changé
dans la production de courts métrages ?
Ron Dyens :
Cette aide remplace le COSIP automatique. Ce dernier
ne concerne que quelques sociétés qui ont pas mal d’années
d’existence et qui font énormément de volumes de ventes
aux télévisions. L’aide au programme vise à récompenser
un travail de la part des maisons de productions sur les
territoires français et étranger, aussi bien en termes de
festivals qu’en termes de ventes. C’est plus honnête car
on a moins besoin de connaître les responsables des chaînes
de télévision pour avoir des points, mais le danger, c’est
que certaines maisons de productions vont peut-être ne plus
vouloir faire que des films commerciaux, des sujets courts,
humoristiques, parfois plus facilement sélectionnés. En
même temps, quand on sait qu’on va obtenir au moins 40 000
euros, on peut les re-basculer sur des projets plus intimistes
et plus difficiles à financer. Ce sont des stratégies différentes
de la part des maisons de production. Certaines veulent
travailler sur des projets de films d’action, et se servent
de l’aide au programme pour financer ces films.
Quand on a accumulé suffisamment de points dans l’année,
on sait également à l’avance que l’on va obtenir l’aide
au programme. On peut donc déjà anticiper la production
du programme de l’année. Alors que lorsqu’on envoie un projet
à l’aide sélective en janvier, il ne passe le premier tour
qu’en mai-juin, puis il est ensuite sélectionné ou non en
commission plénière : impossible de pouvoir faire à
l’avance des démarches complémentaires à destination des
régions et des télévisions. Car l’argent amène l’argent,
et quand un jury de la commission d’aide en région sait
qu’on va obtenir 40 000 euros de l’aide au programme, c’est
toujours le projet qui figure dans le programme de l’aide
au programme qui a le plus de chances d’obtenir une aide
régionale. Car la région sera presque sûre que le film sera
financé. C’est moins évident pour l’aide sélective, cela
ne rassure pas toujours et cela crée donc pour les financements
un rapport au rythme très différent pour les maisons de
production.
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Objectif Cinéma :
Sacrebleu a obtenu pour
le financement de ses films précédents de nombreuses aides
régionales : est-ce qu’il est « facile »
d’obtenir une aide régionale pour un court métrage ?
Ron Dyens :
C’est un peu particulier. Toutes les régions n’aident
pas le court métrage, chacune a ses propres critères de
sélection. Certaines sont exigeantes, n’acceptent pas
la présence d’autres aides régionales pour le même film,
d’autres veulent qu’on tourne la totalité du film dans
la région en question. Si telle région du Sud de
la France nous donne 10 000 euros pour un film de vingt
minutes, il faudra amener toute une partie de la logistique,
de l’équipe de tournage, cela coûte de l’argent. L’aide
coûtera alors plus cher que la logistique à mettre en
place.
En France, on a un gros problème de centralisme. Les régions
devraient acquérir plus d’économies, Paris est surchargé,
c’est important qu’une maison de production située dans
un petit village ou même à Angoulême, Bordeaux ou Perpignan
puisse exister et vivre de son désir de création. Et
ce n’est pas le cas en ce moment.
Les régions doivent donc aider plus et mieux. Elles doivent
mettre en place des critères pertinents et doivent aider
les maisons de production à les remplir. Par exemple,
il faut payer les techniciens. Qui va les payer si les
régions nous donnent 10 000 euros pour qu’on amène presque
toute la logistique en région ? On ne peut pas. L’aide
doit être conséquente, il doit y avoir une sorte de contrat
entre la maison de production et l’aide régionale pour
permettre de professionnaliser les techniciens. On sait
de toute façon qu’avec avec le nouveau protocole d’accord
des intermittents du spectacle, nous allons perdre 30%
des techniciens, il faut que ceux qui restent soient bons.
Ils le seront, normalement, mais le court métrage pâtira
de ces nouvelles mesures car avec 30 % de techniciens
en moins, notre rôle de formateur va disparaître.
Les régions ont créé un contrepoint au CNC qui ne nous
avait pas aidé avant que l’on obtienne l’aide au programme.
Les télévisions ne nous ont pas aidé non plus en terme
de pré-achat (mis à part France 2 qui nous a permis d’avoir
un pré-achat sur un film), malgré la présence de nos films
dans 200 festivals du monde entier. On a donc envie que
les chaînes de télé se mouillent un peu plus et nous fassent
confiance.