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                    Objectif Cinéma 
                      : Simon est un personnage 
                      tragique : non sans courage, il tente de briser le 
                      cours d’une certaine fatalité en s’opposant à sa mère et, 
                      paradoxalement, il est ramené à ce déterminisme par Isabelle 
                      qui, en un sens, représentait ce qui pouvait lui permettre 
                      de s’en échapper…
                      
                      Emmanuel Bourdieu 
                      : C’est sûr… J’aime bien l’idée que les torts soient au 
                      moins partagés. En même temps, c’est une très mauvaise fin 
                      d’histoire d’amour : quelqu’un fuit, un autre se retrouve 
                      seul dans une cour et traîne ça toute sa vie… Isabelle représente 
                      quelque chose d’ambivalent, à la fois l’exil (partir à la 
                      ville) et, en même temps, une espèce d’amour pour le pays 
                      (elle partait pour revenir). Mais le fait qu’elle ne reviendra 
                      jamais crée une désillusion terrible. Là encore, tout est 
                      le fruit de témoignages. Du côté parisien, j’en ai eu beaucoup : 
                      des gens de la fonction publique qui partent convaincus 
                      qu’ils reviendront au pays dans les deux, trois ans, et 
                      qui ne reviennent jamais, tant pour des raisons administratives 
                      que personnelles.
                      
                      En même temps, Isabelle ne peut pas savoir ce qui s’est 
                      passé en haut, avec sa mère. C’est vrai, elle sait que la 
                      mère de Simon déteste son père, la déteste elle-même et 
                      qu’elle ne veut pas de ce mariage. Mais je crois qu’Isabelle 
                      ne peut pas soupçonner la violence qu’elle a eue pour Simon 
                      et c’est ce qui le rend très courageux. Mais c’est alors 
                      que cet homme si déterminé, si droit, fait un détour. Et 
                      ce détour le perd.
                      
                      
                      Objectif Cinéma 
                      : Parlons de Lucas, à présent. 
                      C'est un personnage très ambigu. Il tente de jouer les entremetteurs 
                      entre Simon et Isabelle et, pourtant, il n’est pas sans 
                      chercher à la séduire. N'est-il pas un peu traître par rapport 
                      à Simon ?
                      
                      Emmanuel Bourdieu 
                      : Lucas n’est pas du tout cynique. Il est au contraire très 
                      sincère dans sa volonté de faire le bien de ses amis, très 
                      sincère dans sa conviction que les choses peuvent s’arranger. 
                      Il est également convaincu qu’il est toujours de ce pays, 
                      du Béarn. Lucas agit toujours comme si tout allait bien, 
                      tout était bien. C'est aussi quelqu'un de très optimiste 
                      vis-à-vis des autres et d'assez pessimiste quand il s’agit 
                      de lui. Il a une certaine sévérité sur lui-même, surtout 
                      vers la fin. Mais ce qui est important pour moi, et que 
                      j’ai mis beaucoup de temps à digérer, c’est que Lucas est 
                      un personnage de sociologue, un chercheur qui devrait être 
                      extrêmement lucide et qui devrait voir les choses. Or, il 
                      ne voit rien : l’histoire de Lucas, c’est celle de 
                      l’aveuglement de quelqu’un qui devrait voir. Pour moi, c’est 
                      très important.