Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 

Objectif Cinéma : Avoir découvert le cinéma à la télévision implique un rapport complètement différent avec les films, c’est un phénomène générationnel, qui implique aussi les jeunes critiques de cinéma, nourris aujourd’hui d’une culture mêlant nouvelles images, clips, courts métrages, jeux vidéo…

Nicolas Boukhrief : Un réalisateur actuel qui souhaiterait toucher par son cinéma les jeunes générations est non professionnel s’il ne joue pas lui-même aux jeux vidéo. Nous, cinéastes, sommes censés être au courant de ce qu’ont dans la tête les gens à qui nous proposons nous-mêmes un produit. C’est une faute professionnelle si on ne le fait pas. Toutes les nouvelles générations jouent au jeu vidéo, ils ont en conséquence un rapport complètement différent à la fiction, ils sont habitués à toujours être en interaction avec l’image, à être acteur et scénariste dans certains jeux, et victimes dans d’autres. Ce que la 3D m’a amené en termes de rapport à la fiction et à la rêverie n’a pas de prix ! J’ai beaucoup joué, sur toutes les consoles, je ne sais pas dans quelle mesure ça m’a influencé, mais Le convoyeur est assurément le film d’un joueur ! Comme Le pacte des loups d’ailleurs, qui parle plus à des mômes qui ont joué à Final Fantasy, même si ça paraît ringard à d’autres…On peut me dire que Le convoyeur est un film sombre dans les critères du cinéma d’aujourd’hui, mais dans les critères du rayon Playstation de la Fnac, c’est autre chose. Les mômes sont déjà habitués à des univers très sombres.

  Le Convoyeur (c) D.R.

Objectif Cinéma : C’est la même chose pour le rapport à la musique…

Nicolas Boukhrief : Je suis atterré par la plupart des musiques de films français ou américains, par la baisse du niveau de musique mondial des bandes originales… Une de mes grandes fiertés pour Le convoyeur, c’est que les gens aiment beaucoup la musique et en parlent beaucoup… Avec Nicolas Baby, on travaille dès le scénario. Il me fait écouter la musique, ça me fait penser à des scènes, je tourne parfois ensuite avec cette musique, je la fais écouter aux acteurs, au chef machino qui l’a dans l’oreillette au moment du travelling, et qui fait le travelling exact avec la musique qu’on aura après. Quand cette musique ne reste pas, Nicolas en propose une autre similaire, avec le même tempo, mais plus efficace… Sur Le plaisir, la musique était plus opératique, plus prétentieuse…Là on a travaillé le climat et l’action. Mais il est fondamental de travailler très tôt en amont d’un film avec la musique. Il faut qu’il y ait un lien organique. Toutes les grandes scènes de cinéma de ma vie sont liés à la musique.


Objectif Cinéma : Le clip a bouleversé aussi le rapport de la musique et de l’image…

Nicolas Boukhrief : A son arrivée, le clip fut une nouvelle mode qui a envahi le cinéma : il y avait plein de films clipesques sans fond ni récit, c’était un peu comme une nouvelle vague. Le clip a entraîné un nombre important de tics visuels avec comme géniteurs des types surdoués, mais aussi plein de tâcherons, qui ont envahi le cinéma dans les années 80, dégageant l’idée d’un récit fort et structuré. On le paye encore aujourd’hui ! Mais avec les clippeurs, il y avait cette idée que la musique devait être organiquement liée à l’image. Chaque mouvement artistique apporte des choses qu’il faut intégrer ensuite parce que ça fait autant de films que les gens ont vu et connaissent : tu ne peux pas tourner un film aujourd’hui comme si la nouvelle vague n’avait jamais existé ! C’est impossible !  C’est la même chose pour le clip.