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Sauvage Innocence (c) D.R.
Ensuite il faudrait que je parle d'esthétique. J'ai fait des films grattés. Ce qui m'intéresse beaucoup, c'est le montage. Je me suis dit plutôt que de travailler sur le montage entre les photogrammes pourquoi ne pas travailler le montage dans le photogramme. D'où l'idée entre autres, d'inclure du Super 8 dans du 16 mm, par exemple. Si j'en avais, je l'aurais peut-être mis en plus dans du 35 mm. Mais je n'avais pas de 35 à l’époque. D'autre part ce qui m'intéressait, c'était outre cette confrontation du rythme, la confrontation des « histoires », c’est-à-dire de ce qui est dit sur la pellicule. Dans mes premiers films, le deuxième par exemple – Imagogie - je confronte des Super 8 familiaux de ma vie quotidienne, avec des rushes qui viennent de la télévision, des rushes imbéciles du style « les gens appuient sur un champignon pour dire que c'est à leur tour de parler », enfin des choses comme ça. Et c'est pour ça que ça s'appelle Imagogie. C'est un néologisme construit sur la collision de Image et démagogie, qui a donné Imagogie. Ce film a été présenté pour la première fois au ciné-club de St Charles, à l'université de Paris 1. Il a été présenté avec un son de talkie-walkie : deux personnes qui se parlaient dans la salle pour qu'à chaque fois le son se renouvelle. Donc il y avait d'une part mon travail d'inclusion d'images et le travail sur le rythme, et d'autre part un travail dans le son, la réversibilité du son, le fait que le son est quelque chose qui disparaît à la différence de l'image, enfin c’est deux manières différentes par l’image et le son, de faire disparaître.

Pour aller vite j'ai également travaillé dans la direction des signes. J'ai beaucoup travaillé sur le rapport qu'on peut entretenir avec la graphie, soit par le biais d'enseignes, soit par le biais d'affiches : piquer des signes. Et en général je prends des graphies étrangères que je ne comprends pas : japonaise, arabe etc. Pour moi c'est extrêmement graphique : je les photographie, je les monte, je les incruste, je travaille sur le rythme, je les colore etc. C’est le deuxième versant de mon travail.

Le troisième versant est absolument puriste, c'est un travail de grattage, de lettres, de jeux de mots sur la pellicule. Il n'y a parfois rien d'autre à voir que ce que j'écris. Par exemple, j'ai fait un film, commencé en 1982 et montré pour la première fois en 1995, qui est un journal non-filmé. Au lieu d'écrire tous les soirs mon journal sur un cahier, je l'ai fait sur de la pellicule, et ensuite je projette mon journal. Donc les gens voient quel était mon état d'esprit par exemple le 13 décembre 1983, ce que je pensais, ce qui s'est passé dans ma tête etc. Je ne sais pas s'il y a des directions, mais s'il y en a ce serait la troisième.

De façon générale ce qui m'intéresse c'est vraiment le travail sur le rythme, le travail sur la couleur. Je suis fascinée par la couleur. Le rapport aussi que je peux entretenir entre mes films et mon travail plastique, parce que j’ai fait pas mal de photos de choses.

Maintenant, je travaille beaucoup à la truca, j’ai fait récemment de nombreux nouveaux films…