La gazette du doublage :Pourriez-vous nous parler de l’expérience
du Grand Cirque Ordinaire ?
Pierre Curzi :Le Grand Cirque Ordinaire était, lui
aussi, une troupe extrêmement importante au Québec.Cette troupe
était constituée à la fois d’élèves de l’Ecole Nationale de
théâtre et du Conservatoire d’art dramatique de Montréal et
pratiquait l’improvisation à partir d’un vague canevas que
nous écrivions et des personnages réguliers. Il y avait des
chansons et des musiciens, on a même été la première troupe
à intégrer des musiciens « vivants » sur scène au
Québec.
C’était une formidable école car il fallait se renouveler
constamment et on a créé 7 ou 8 pièces qui ont été déterminantes
pour bien des carrières chez nous.
La gazette du doublage :
Vous êtes devenu comédien à
un moment décisif de l’histoire du Québec. Dans quelle mesure
ce contexte historique et culturel a t’-il été déterminant dans
vos choix d’artiste et d’homme engagé ?
Pierre Curzi :Il est certain que tout notre parcours
au théâtre et nos premières armes au cinéma s’accompagnaient
d’une structuration de la conscience politique de la société
québécoise. J’étais un peu isolé au départ parmi mes camarades
qui avaient des préoccupations socio-culturelles alors que
j’avais déjà des convictions politiques fermes mais bien qu’il
y avait des troupes plus politisées que les nôtres nous avons
participé à ce mouvement qui a mené au premier référendum.
La gazette du doublage :Les artistes québécois sont extrêmement
polyvalents par nature et par la formation très complète qu’ils
reçoivent. Vous même êtes familier de la scène, de la télévision
et du cinéma. Qu’est-ce qui vous attire et vous intéresse
dans ces modes d’expression ?
Pierre Curzi : Pour
vivre du métier d’artiste au Québec il faut pratiquer un peu
tout. On ne peut pas vivre exclusivement du théâtre, du cinéma…
la télévision est un cas particulier… Notre expérience d’improvisation
au théâtre nous a amenés à être les acteurs privilégiés du
cinéma car nous savions nous diriger nous même ce qui était
apprécié des cinéastes québécois alors à leurs débuts. En
effet, ils étaient issus pour la plupart du documentaire.
C’était une belle époque pour le cinéma. Nous collaborions
étroitement avec les réalisateurs et les scénaristes et influencions
les choix cinématographiques. Puis nous sommes devenus relativement
connus et la télévision nous a offert des rôles au moment
où précisément elle lançait de grandes séries dotées de moyens
presque équivalents à ceux du cinéma.
Nous nous sommes un peu « embourgeoisés » par la
suite et après l’échec du référendum en 1980, notre volonté
collective s’est démembrée et chacun s’est consacré exclusivement
à sa carrière.