Au bout d’un moment, je tournais de
moins en moins de films puisque j’étais un peu obnubilé par
le clip. Mais j’ai pris d’autres voie, j’ai bricolé à droite
à gauche, je refusais de plus en plus de clips, comme Mickey
3D, ce qu’on me reproche encore, pour finir par découvrir
des évidences. Si mes premiers clips étaient bien, c’est parce
que j’y croyais. Mais les groupes qui me plaisaient étaient
morts. Et ça ne s’était pas toujours bien passé avec d’autres
groupes en activité, mais moins intéressants. Je me suis mis
un peu en retrait, et je suis devenu enquêteur téléphonique
(!).
On s’emmerdait, on faisait des conneries, mais l’équipe de
copains qui s’était formé là-bas était passionnée de cinéma.
À la fin d’une séance au cinéma La Clef, on a décidé de se
montrer les films qu’on avait déjà faits. Grâce à une sorte
de quiproquo, on a fini par tous faire un nouveau film en
même temps avec une charte serrée, un peu à la dogme. On devait
faire le film en un mois et se le montrer. Les Petits Films
étaient nés. Ça a très bien marché pour moi dès le premier
film. Il y avait beaucoup d’expérimentations, et nous avons
continué à faire des films tous les mois en fixant des thèmes
du genre « un petit film en trois plans », « un
petit film de Noël sans Père Noël mais avec des mots »,
« un petit film de 28 plans dont 11 plans larges et 17
gros plans », « un petit film avec un panoramique
d'au moins 360° (et son orchestre) ».
Pour moi, ça a duré trois ans, j’ai fini sur les genoux, épuisé,
à bout de nerfs. Tu te rends compte que tu satures, tu ne
peux pas faire un film par mois pendant des années. La première
année était super intéressante, puis ça s’est un peu dégradé,
il y a eu ensuite de légères tensions entre les gens. Je suis
parti, mais un autre groupe s’est formé, le Rodéo Club.
Objectif Cinéma :
Vous montriez vos films en
salles ?
Rodolphe Cobetto-Caravanes :
On a montré nos films la première fois à la date anniversaire
de la séance à la Clef à la suite de laquelle nous avions
fondé Les Petits Films, dans la même salle, et les gens
ont adoré les films et venaient nous féliciter. Ils étaient
dithyrambiques, nous étions très étonnés. Alors, on s’est
un peu emporté et puis beaucoup de gens ont voulu faire
partie des Petits Films, mais on n’a pas su évoluer. Il
aurait fallu trouver un autre mode de fonctionnement pour
la deuxième année. Les gens connaissaient Les Petits Films
dans le cinéma expérimental. L’expérience m’a permis de
recommencer à faire du cinéma, à faire des tonnes de films,
dont il ne reste pas grand-chose, mais qui a vu naître Twentuno
qui était le deuxième film que j’ai fait au sein des
Petits Films.