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  Ed Wood (c) D.R.
Objectif Cinéma : Mais on y retrouve tous les thèmes que tu abordes dans tes autres films, la transformation puis la disparition des corps. Toujours la nostalgie de quelque chose qui a disparu.

Rodolphe Cobetto-Caravanes :Je ne pensais pas que la nostalgie se voyait dans mes films, mais je suis en effet un garçon très nostalgique. J’aime filmer ou photographier les choses qui vont disparaître. Je regrette amèrement par exemple ne pas avoir pris de photos de la synagogue qui a brûlé dans ma rue et de ses vieilles portes en bois qui étaient des témoins du passé, que j’ai toujours connues.

C’est peut-être parce que j’ai peur que mes films ne soient pas assez intéressants comme ça, et du coup, j’y montre du passé. Pour moi, un film quelconque des années 60 ou 70 paraît toujours beaucoup plus intéressant qu’un film quelconque d’aujourd’hui. Et ça rejoint aussi le fait de tourner en super-8, qui est souvent un héritage familial, qui est en tout cas un des symbole de l’enfance et du passé de ma génération. Il y a peut-être de ça dans mes films.
J’aime le côté décalage aussi, le côté série B, sorte de série A frelatée. J’ai vu dernièrement un des premiers Roger Corman : Sorority Girl. J’aime l’idée de faire un film avec peu d’argent, ça développe la créativité. Au début, je voulais tourner Alien dans mon appartement de 40m2. Quand j’ai vu Ed Wood de Tim Burton, j’ai réalisé qu’Ed Wood avait raison, bien qu’il croyait un peu trop au cinéma. Il faudrait fonctionner par « cut-up », ne pas réfléchir, juste faire du « cut-up » et voir ce que ça donne après. Comme avec la bande-son d’Ajar qui paraît très linéaire, mais qui provient en fait de trois livres différents mais lu par la même voix. C’est la magie du « cut-up ». Son problème, si c’en est un, c’est que parfois c’est tellement fluide qui tu ne te rends plus compte que c’est du « cut-up », comme avec certains morceaux à base de samples.


Twentuno (c) D.R.
Objectif Cinéma : Tu me dis que tu as une tendance à filmer les choses qui vont disparaître mais toi-même tu fais disparaître les choses.

Rodolphe Cobetto-Caravanes : Je ne suis plus d’accord avec l’idée de « remodeler ». Mon premier film en super-8 était raté, tout noir, alors j’ai essayé de le passer à l’eau de javel, de le travailler, et ça a donné des choses par hasard au départ. J’ai continué à travailler dans cette veine-là, et finalement je ne faisais plus d’images, je m’intéressais seulement à les repeindre. Le premier film que j’ai fait avec Les Petits Films, Zeitlupe, c’est un plan parfait que je n’avais absolument pas retouché, et ça m’a vraiment emmerdé sur le coup. Le film d’après, Twentuno était par contre totalement raté au niveau de la lumière, et donc j’ai repris mes expérimentations. Mais, depuis, il y avait eu une évolution. Je ne voulais plus détruire mais remodeler et réfléchir à l’intervention sur pellicule de façon constructive, car tu peux obtenir beaucoup de choses. Je savais faire pas mal d’effets, leur faire dire quelque chose était une autre paire de manche.