Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 

Il se trouve que le sujet de l’initiation en général et de la transmission en particulier parcourt le cinéma depuis son origine jusqu’à aujourd’hui, et qu’on lui doit nombre des plus belles œuvres du 7ème art. On ne dressera pas ici une liste des films concernés – Alain Bergala s’en charge lui-même (p.56) – et chacun a sans doute présent dans un recoin de sa mémoire le souvenir de telle ou telle œuvre initiatrice.

" On sait le rôle joué par Les Contrebandiers de Moonfleet pour une génération de cinéphiles qui y ont noué un lien à vie avec le cinéma […] sans doute parce que ce film leur parlait, mieux que tout autre, de leur rapport au monde : un enfant, comme eux, voit des choses dont il sent bien qu’elles le concernent, qu’elles sont vitales pour lui, même s’il n’est pas encore tout à fait en mesure de les comprendre complètement, sinon par intuition, et qu’elles constituent la part d’énigme du monde des adultes dont il dépend : la sexualité, la trahison, la violence, la mort ". (p.55).

Ces films sur la transmission apportent sans doute d’eux-même le principe à partir duquel doit s’élaborer une pédagogie du cinéma, à savoir que

" "seul le désir instruit" et que la seule transmission qui compte – celle de l’intransmissible disait Blanchot – se passe souvent de parole, ou passe en tout cas par très peu de paroles. Peut-être tout n’est-il pas à verbaliser dans un film, même en situation pédagogique, pour que les enfants sentent que quelque chose qui n’a pas été dit, a quand même été vu dans la connivence de l’indicible ". (p.51)

  Moonfleet (c) D.R.
Nouveau coup de pied donné à "l’institution du cinéma comme langage", et donné par le cinéma lui-même. Pourquoi le désir de cinéma, le manque inhérent à tout désir, devrait-il être tout entier empli par le discours analytique, critique, sensé, etc… du seul savoir ? On oublie peut-être trop souvent que l’enfant est, étymologiquement, celui qui ne parle pas (in fans).

" La transmission, lorsqu’elle n’est pas une pure fonction du social, met toujours en jeu quelque chose qui échappe à la simple volonté de transmettre (qui est celle, par définition, de l’école) et relève de la circulation inconsciente d’une lettre, d’une phrase, d’un signe, d’une image. Elle tranche résolument entre les cinéastes appliqués, qui ne croient qu’à la maîtrise et au scénario, et ceux, pour qui le cinéma est un art, qui savent que les puissances du cinéma relèvent aussi du Symbolique et de l’inscription d’une lettre dont ils ne peuvent prétendre régler de façon policière la circulation. Cinématographiquement, c’est évidemment la transmission la plus intéressante. Et psychiquement, celle qui laisse le plus de traces. Elle met salutairement en jeu les limites de tout volontarisme en matière de pédagogie du cinéma. " (p.56)

 

" POUR UNE "ANALYSE DE CREATION" "

Le champ du possible

La volonté d’extraire le cinéma de la tyrannie du langage et de l’institution ne signifie bien évidemment pas que l’initiation au cinéma doive se passer du langage. Cette volonté tient simplement à la conviction de l’auteur

" que dans les années à venir, il faudrait donner la priorité à l’approche du cinéma comme art (création du nouveau) sur celle, canonique, du cinéma comme vecteur de sens et d’idéologie (ressassement du déjà-dit et du déjà-connu) " (p.22)