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  Robin des bois (c) D.R.

Le ton sympathiquement révérencieux à l’égard de l’ " émoi " des autres a le mérite de remettre chacun à sa place. Choisissez votre camp : corruptible ou incorruptible de l’émotion ? Mais là où ce parti pris, ce regard atteint toute sa dimension, c’est dans la confrontation (fortuite) avec un regard tout à fait amateur, au sens de novice. Une pratique de la critique qui ne se pense pas mais se vit. Comme une évidence. Truffaut disait : " On a tous deux métiers : le sien propre et critique de cinéma ". Au pied de la lettre, et un peu plus près encore, cela donne l’excellente initiative de la revue Repérages qui, dans sa rubrique Enfance, soumet la vision d’un (grand) film au regard d’un enfant. On est frappé par l’acuité du regard, autant dans la prise en compte des détails que dans la mise en perspective du film. Morceaux choisis, à propos de La Rose Et La Flèche  (Robin and Marian) de Richard Lester (1976), commenté par Jeanne Boucher :

  • L’impôt a l’air léger, j’ai vu un paysan qui ne donnait qu’un seul coq. Dans Robin des Bois, Prince des Voleurs (Kevin Reynolds, 1991), que j’ai vu aussi, c’est six ou sept coqs. Il aurait fallu que les mecs qui ont fait les films se mettent d’accord : il y en a forcément un qui a tort. "
  • Son épée est lourde et vieille, pas très perfectionnée et il ne la nettoie que toutes les deux ou trois bagarres. Le combat entre Robin et le shérif de Nottingham est épuisant.(…) on dirait qu’aucun n’a vraiment envie de tuer l’autre. En fait, ils ont les mêmes souvenirs. "
  • Le suicide de Marianne à la fin du film ? Etonnant ! Moi, si mon amoureux fait des bêtises, j’en change, je ne me tuerais pas pour ses conneries à lui ! "
  • Il (Robin) n’écoute absolument pas les conseils de Petit Jean. En fait, il ne cherche qu’à correspondre à sa légende - que je connaissais avant de voir ce film, grâce au dessin animé. "
  • Le dessin animé (Disney, 1973) est nul. Celui qui l’a inventé ne comprend rien. C’est une histoire avec des êtres humains et il les transforme en animaux. Par exemple, le roi Richard est représenté en lion, on passe son temps à se demander s’il ne va pas manger ses sujets - ce qui serait logique. Mais l’être humain qu’il représente est censé être bon, donc il ne dévore personne. Bref, on ne comprend rien. "
  • La plus belle image, c’est l’arrivée de Robin et Petit Jean à Sherwood dans les champs de fleurs (…) , les montagnes recouvertes par la forêt, le vent qui souffle, la trace laissée par le passage des chevaux dans les hautes herbes, les couleurs… On voit absolument tout dans la même image, j’aurais aimé m’y perdre. Disparaître au fond du décor, quitte à ce que l’on ne me retrouve plus. "
Infidèle (c) D.R.

Vous sentez cette brise ? que dis-je ? Le cyclone des dernières paroles. Du haut de ses 9 ans, Jeanne insuffle un désir de cinéma incommensurable. Loin de l’incorruptible et mortifère conscience critique d’un Kaganski pour qui la passion (et la transmission de cette passion) du cinéma semble se lover dans les oripeaux de la nostalgie, tel un cadavre en putréfaction. Démonstration :

  • Alors pourquoi Infidèle, d’après un scénario de Bergman, cinéaste de chevet, nous a-t-il laissés indifférents ? Parce qu’il a la couleur, le goût et l’odeur de Bergman mais que ce n’est pas du Bergman. "
  • Surtout, Liv Ullmann fait du Bergman sans posséder la puissance d’expression, l’inventivité radicale de son maître.(…) Ullmann est tellement fidèle à son modèle qu’on ne peut s’empêcher de percevoir dans son film qu’un scolaire exercice de style, une tranche d’académisme bergmannien un peu datée. "

Quelle hypocrisie ! Une arnaque intellectuelle ! Liv Ullmann n’est qu’un souffre-douleur entre les mains de Kaganski, la vraie cible étant Bergman. L’auteur règle ses comptes, à demi-mots, avec un cinéaste qu’il ne supporte visiblement pas, sans parvenir à l’assumer et le dire ouvertement. Alors, il se perd dans les méandres du débat débile objectivité/subjectivité, prenant soin de se proclamer dans le camp de l’objectivité, celui de la raison sans passion, qui, comme chacun le sait, existe bel et bien (le monde est un objet). Or, objectivement et raisonnablement, Bergman, " cinéaste de chevet ", " maître ", est intouchable : objet de contemplation ; Liv Ullmann l’ersatz doit charger.