 |
|
|
|
Certains spectateurs
reprochent déjà à Plaisirs inconnus
l’ennui et le sentiment d’impasse qui le sillonnent, avec
ces gestes et ces corps sans cesse frustrés et arrêtés
dans leur mouvement et, parfois même, tragiquement immobiles,
tels ces deux jeunes à plusieurs reprises figés
à côté des filles. Mais une des postures
fortes du film est précisément de montrer l’idée
du plaisir rendue à l’état zéro, inerte,
perdue de vue. Le plaisir est ici devenu inconnu en effet,
il n’est nulle part et ne semble pas toucher cette jeunesse
pour laquelle ce sentiment vital semble un monde lointain,
ou celui visible dans les téléviseurs (chansons,
dessins animés, jeux olympiques).
Jia Zhang Ke travaille donc son sujet sans complaisance, avec
un récit construit, composé de leitmotivs :
retours des mêmes dialogues, situations, lieux et chansons.
Le récit lui-même peut sembler ainsi systématique,
répétitif, mais cela est bien l’objet traqué
: la machine contemporaine à broyer les esprits et
les corps libres. Et l’Amérique d'être présente
au cœur du film à travers un billet d’un dollar admiré,
la musique de Pulp Fiction sur laquelle on danse et
imite les gestes des stars hollywoodiennes, et le visage du
Général Powell à la télévision
en spectre au fond du cadre, au fond du film. Cette mère
(la seule du film), enfin, rêvant de voir son fils Bin
Bin être incorporé dans l’armée chinoise.
Seul avenir encore une fois : celui du geste militaire.
|
 |
|
|
Restent pourtant quelques
moments d’ouvertures possibles dans Plaisirs Inconnus
et quelques moments drôles : l’ouverture difficile du
robinet dans la chambre d’hôtel, l’impertinence (la
vitalité) de Qiao Qiao, et l’écho foncièrement
ironique à la musique de In the mood for love dans
un appartement voisin. Pas d’élégance feutrée
ici, pas de beaux tissus ou de beaux ralentis, pas de bande
sonore façon juke-box, mais la représentation
crue d’une réalité contemporaine s’achevant
ici dans un commissariat où Bin Bin chantera sa liberté,
dos au mur, sans vraiment d’espoir ou de lueur dans les yeux,
mais stimulant peut-être chez certain(e)s un authentique
et rare plaisir de cinéma, avec la conscience d’être
témoin d’un monde toujours sans mue.
 |
|
 |
|
Titre : Plaisirs inconnus
Titre VO : Ren xiao
yao
Réalisateur :
Jia Zhang Ke
Scénariste :
Jia Zhang Ke
Acteurs : Zhao Wei Wei,
Wu Qiong, Zhao Tao, Zhou Qing Feng, Wang Hong
Wei, Bai Ru, Liu Xi An, Xu Shou Lin, Ren Ai Jun,
Xiao Dao, Ying Zi, Wang Li Min
Directeur de la photographie
: Yu Lik Wai
Producteurs délégués
: Masayuki Mori, Hengameh Panahi, Paul Yi
Chef monteur : Chow
Keung
Producteur : Li Kit
Ming, Shozo Ichiyama
Exportation internationale
: Celluloïd Dreams, Production Lumen Films,
Office Kitano, E-Pictures
Distribution : Ad Vitam
Pays : chine, france,
japon, sud-corée
Date de sortie : 22
Janvier 2003
Durée : 1 h 53
mn
Année : 2001
|
|
|