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Or donc ici, c’est à un projet aux
enjeux nombreux auquel s’est attelé ce cinéaste : à
travers sa « love story » nippo-thaïlandaise,
c’est à la concrétisation d’une communauté d’intérêts entre
producteurs indépendants thaïlandais et japonais que nous
assistons : la présence de Asano Tadanobu, l’acteur
en vogue du cinéma japonais, fait signe de l’ambition pan-asiatique
de Last Life in the Universe. Miike Takashi vient
faire un petit tour en yakuza débonnaire; Last Life in
the Universe affiche les signes ostensibles de son appartenance
revendiquée à un réseau artistique, où il s’agit à toute
force de faire résonance aux films « amis » (ici
ceux de Miike). C’est tout à fait le genre d’enjeux qui
peut inhiber un cinéaste, ou tout du moins pervertir le
désir mutuel des partenaires de création de faire un film.
Les contraintes sont dès lors pesantes, et ne laisse la
place qu’à l’habileté. Le film en souffre peu, tant ses
ambitions sont faibles : une histoire d’amour maladroite,
un fond de tristesse, le tout baignant dans une ambiance
délétère de régression. Dès lors la virtuosité formelle
et le bon goût des protagonistes se donnent à voir, dans
ses images soyeuses de volupté, dans les cahots maîtrisés
du scénario.
C’est peut-être la pire forme d’académisme possible, car
chacun en ressort satisfait : les bailleurs de fond,
puisque le film a tout du produit facilement exportable,
plaisant pour toutes les papilles ; le cinéaste, car
il pourra toujours défendre ce film comme un « banc
d’essai » pour des projets ultérieurs ; et le
spectateur, touché par tant de joliesse, et reconnaissant
pour les petites stridences scénaristiques vite résolues,
et largement recyclées de 6ixtnin9, qui ont su maintenir
son intérêt en éveil.
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De par la nature métissée du projet,
nous avons donc droit au questionnement de la rencontre
Japon-Thaïlande au travers de leurs stéréotypes, voire une
forme d’inquiétude confuse dans l’opposition d’un contexte
urbain « japonisé » (on n’y croise que des Japonais,
gangsters de préférence) et d’une campagne-havre de paix,
pleine d’une sensualité ultra-séduisante, et où réside le
cœur du pays. Mais Ratanaruang est un urbain, et c’est en
citadin qu’il décrit très vite les forêts de palmiers, les
visages marqués des paysans, et les délicieux miroitements
de la lumière campagnarde.