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Seulement, comme va très vite s'en
apercevoir Casim, en amour, les petits arrangements que
l'on fait avec son cœur fonctionnent rarement. Certains
parviennent néanmoins à se cacher la vérité, à croire au
bonheur sans passion, mais Casim n'est pas de ceux-là. Quand
il rencontre Roisin, jolie professeur travaillant dans une
institution catholique, c'est le coup de foudre. Au diable
la famille, au diable les conventions, au diable le mariage
à venir, la passion parle et le corps reste sourd à toute
autre considération qu'une attraction physique irrépressible.
La suite du film va s'articuler autour de ce personnage
féminin. Parce que elle va très vite apparaître aux yeux
de beaucoup de monde comme l'empêcheuse de tourner en rond.
Auprès de la famille de Casim d'abord, qui voit d'un mauvais
œil un rapprochement qui complique leurs désirs (montrer
à la communauté qu'ils contrôlent leurs enfants, installer
Casim et sa future femme dans une annexe de la maison...).
Auprès des dirigeants de l'établissement catholique dans
lequel travaille Roisin ensuite. Ces derniers ne veulent
pas de copulations hors mariage dans leur personnel, qui
plus est quand ces ébats se déroulent en compagnie d'un
musulman basané.
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C'est là la grande force de Just
A kiss : confronter deux intégrismes. L'un catholique,
l'autre musulman. Car ces deux dérives religieuses sont
similaires dans leur méthode - l'intimidation - et dans
leur finalité - nier la liberté de l'individu au profit
d'un cadre rigoriste permettant d'avoir la mainmise sur
autrui -. Dans les deux cas, l'amour fait peur, car cette
chose insensée ne peut être contrainte dans un schéma préétabli.
Si l'on contrôle la vie sexuelle de quelqu'un, on le contrôle
tout entier. D'où la mise en avant du voile, paraît-il moyen
le plus efficace de préserver sa pudeur, de l'abstinence,
paraît-il moyen le plus efficace de ne pas recourir à l'avortement,
ou de l'homosexualité, désignée dans une belle unanimité
comme tare divine par toutes les institutions religieuses.
Ken Loach présente ces deux attitudes réactionnaires de
manière réaliste, avec la reproduction fort crédible de
discours moralisateurs qui n'ont d'ailleurs pas grand-chose
à voir avec les textes religieux. Il ne s'agit pas de respecter
des commandements divins, mais de se conformer à des traditions
qui refusent d'évoluer avec leur époque. Le conservatisme
catholique et le conservatisme musulman mènent le même combat
: nier le libre-arbitre, réduire à néant les Lumières. Voilà
ce que décrit avec beaucoup de justesse Just A kiss.