La famille, le couple, la religion,
le terrorisme, la petite et moyenne bourgeoisie proche du PCI
sont les principaux thèmes que Moretti nous exposent
dans ses films.
Tout ces thèmes sont traités
de manière brute, en relation étroite avec la
vie réelle. Jamais il ne nous impose une utopie, d’accepter
ses idéaux politiques, ou amoureux. A travers ces thèmes,
on devine deux autres réflexions qui poussent Moretti
à se remettre continuellement en cause et qui le touche
de très près : les médias et le cinéma.
Donc, en général, la communication. La pensée
pure d’un être est révélé au spectateur
sans aucune volonté de nuire, ou d’imposer ses propres
convictions. Le problème de communication entre les
êtres est un thème très important chez
Moretti. Un thème qui touche beaucoup de réalisateurs
modernes d’une sensibilité différente. Chez
Garrel, le problème est grave, très mélancolique.
Chez Moretti, ce problème est traité sur un
mode comique. Un problème dont il est lui-même
le plus souvent impliqué directement. Dans Caro
diario, dans l’épisode du Vespa, il (sur)monte
sa peur des autres. Il parle à tout le monde, se sent
heureux, (re)vivre alors qu’il vient d’échapper à
la mort. Puis lentement alors que les gens qu’il rencontre
ne lui offre pas une aussi bonne humeur, et le prenne un peu
pour un "tout fou sautillant", il finit sur la plage
où fut assassiner Pasolini, seul, perdu à nouveau
dans l’existence, n’ayant pas régler le problème
qu’il le tient à l’écart des autres.
CARO DIARIO
Caro Diario est un film autobiographique. Moretti
y joue son propre rôle. Le récit cinématographique
est composé grâce à ses propres expériences
de la vie réelle brute. Dans la vie, Moretti vient
de guérir d’un cancer. Cette guérison lui révèle
comme il est bon d’être et surtout de rester en vie
le plus longtemps possible. Alors que dans tous ces films
précédents, il cherche à comprendre,
sans trouver une réponse très claire, pourquoi
il ne peut se mélanger aux autres, dans Caro diario,
il n’hésite plus, parle aux inconnus dans la rue, leur
exprime sa joie et sa bonne humeur, sautille partout, redécouvre
tous les quartiers de Rome, populaires et résidentiels.
Moretti ne passe plus par des détours ou des ruses
pour oublier ses défauts. Il les affronte de plein
fouet, se mêle à eux. Et ceci est valable dans
les trois parties, la (re)découverte de Rome en Vespa,
l’escapade dans l’île de Stromboli (qui est le titre
d’un filme de Rossellini), et l’enquête sur les médecins.
Trois parties distinctement définies, claires, au contraire
de Bianca, où les transitions entre l’histoire
d’amour, la vie au lycée et l’enquête policière
peuvent paraître assez floues par instant.
LA MODERNITE
Caro diario poursuit la réflexion de Moretti
à son paroxysme. Le cinéaste Italien s’adresse
à notre conscience. Il nous bouscule, il nous offre
un vaste étendu de la vie. Il exprime avec l’image
l’aphorisme de Bresson, le moderne par excellence : "Tourner,
c’est aller à une rencontre". Témoin,
la balade en Vespa dans Rome. Il va à la rencontre
des uns et des autres. Pleinement moderne, Moretti nous gratifie
d’un geste purement documentarisé, qui le saisit par
tous les bouts de sa quête du bonheur de vivre. Il filme
un monde qui le dépasse, où il ne peut évoluer
sereinement. Le monde s’agite autour de lui. Il n’est nullement
question pour lui de le changer, mais de savoir si il peut
l’accepter tel qu’il est. Cette réflexion éloigne
indiscutablement Moretti d’une trame classique, où
les personnages sont assimilés au monde filmé,
où les dialogues révèlent un message
précis, et où la fin du film se conjugue avec
une réflexion ordonnée, imposée, presque
automatisée.