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  Frédéric Back (c) D.R.

Des films pour enfants, Frédéric Back passe rapidement à des films tous publics et son style s'affine, révélant parfois des influences de Chagall (dans Illusion) ou des tonalités nettement impressionnistes (dans L'Homme qui plantait des arbres). La beauté des dessins donne également une plus grande portée à la fabuleuse histoire d'Elzéar Bouffier et permet la création de plusieurs arboretums aux quatre coins du monde. Suivant lui-même la leçon d'humilité et de persévérance de son héros, Back a répété 25 000 fois ce geste de gratitude et de célébration de la nature en plantant des arbres au Québec.

Avec le succès de ses films, Frédéric Back aurait pu décider de créer une structure de plus grande ampleur, suivant ainsi l'exemple de Walt Disney ou même du studio japonais Ghibli, créé dans les années 1980 par  Hayao Miyazaki et Isao Takahata. Mais il préfère continuer à travailler de façon artisanale et passe souvent des journées entières seul dans son petit bureau à Radio-Canada. «Pour moi, faire un film d'animation c'est un peu comme écrire un livre. On oublie le monde et l’on entre dans son univers. Dès que vous travaillez avec quelqu'un d'autre, ça crée des préoccupations. Quand je suis tout seul, je suis concentré, et si c'est mauvais, je jette à la poubelle et je recommence. Mettre le travail des autres à la poubelle, c'est tout de même plus délicat. »

Tout son art réside dans une sorte de minimalisme. «Je ne tiens pas toujours à représenter les choses de façon trop réaliste. C'est la partie en mouvement qui est importante car l’œil se fixe sur ce qui est mobile. Moi, je cherche plutôt à évoquer, et j'essaie aussi d'alterner entre la simplicité et la profusion. Un bon film d'animation, c'est comme un concert : on a besoin de moments de calme pour faire valoir toute la beauté de l'instrument en solo. »


Le « Monsieur Animation » de Radio-Canada

Le Fleuve aux grandes eaux (c) D.R.

Comme disait Virginia Woolf, tout artiste a besoin d'un lieu de tranquillité et d'indépendance pour créer à son aise. Grâce à Radio-Canada, Frédéric Back a pu développer son talent au sein d'une équipe, mais tous les cinéastes d'animation n'ont pas la même chance. Pour remédier à cet état de fait, la chaîne crée en 1970 un programme d'échange avec des pays européens. Back se souvient que le projet permettait à un pays qui avait produit un film d'animation d'acquérir les films produits par tous les autres pays membres de l'échange. Mais il prend fin en 1984, la production étant très inégale et certains pays se sentant floués, explique un Frédéric Back un peu nostalgique. «Le Canada a fait un travail énorme, dit-il. On espérait qu'il y aurait une relève... »

Mais la relève ne vient pas et lorsque Back se décide à prendre sa retraite en 1993, après son ultime réalisation Le Fleuve aux grandes eaux (qui représente cinq ans de labeur et près de 20 000 dessins), Radio-Canada se trouve privée de son «Monsieur animation». La section animation de la chaîne est alors sabordée et le seul moteur du cinéma d'animation canadien reste l'ONF.

Bien qu'il ait dépassé l'âge de la retraite, Frédéric Back dessine toujours sans répit, que ce soit des illustrations de livres ou des collaborations pour des films. Après un ouvrage sur les baleines en 1995, il a conçu les séquences d'animation pour Mémoires de la terre, un documentaire de Jean Lemire qui sera présenté début juin au Festival du film d'animation d'Annecy. Pour les besoins du film, il est allé à la rencontre du peuple Haïda, qui vit depuis plus de 10 000 ans sur les îles de la Reine-Charlotte, au large de la côte ouest canadienne.

  Contes (c) D.R.

Tant qu'il y a une bonne cause, le vieux missionnaire est toujours partant. Mais il ne cache pas son aversion pour les dessins animés «d'un goût douteux» qui envahissent les écrans de télévision les mercredis matin. «C'est une façon très coûteuse de tuer le temps des enfants, alors qu'ils ont beaucoup de potentiel d'apprentissage. Je trouve ça assez destructif car ces films créent le goût de la violence et n'ont aucune valeur au niveau des réalités de la vie. »

Si les Japonais Miyazaki et Takahata citent Back parmi leurs influences, ce dernier dit n'avoir « aucune affinité » avec leur cinéma, qu'il trouve « extrêmement fouillé et trop violent ». Il se reconnaît davantage dans les films de ses amis Michel Ocelot (Kirikou et la sorcière, primé à Annecy en 1998) ou Alexandre Petrov (Le vieil homme et la mer, « oscarisé » en 2000) et valorise le rôle didactique du cinéma plutôt que son aspect divertissant.