Pour le spectateur, la profusion de films offerte ici est
un festin gargantuesque : outre la compétition internationale,
on y trouve la sélection de longs métrages, la présentation
des films aidés par le fond Hubert Bals, quantité de sections
parallèles, d’expositions d’art contemporain. Mais c’est tranquillement,
sans se presser, ni « jouer la montre » (6 séances
par jour enchaînables avec le quart d’heure réglementaire
pour se remplir l’estomac, non, pas cette fois), que sera
rendu compte de cette 33e édition. L’Asie est ici
à l’honneur.
Institution vénérable du cinéma d’auteur mondial, le festival
de Rotterdam n’est que la partie visible d’une entreprise
totalisante qui intègre le mécénat artistique et la médiation :
le festival participe à la production de films au travers
du fond Hubert Bals, qu’il montre ensuite dans sa sélection,
récompense parfois, puis aide à vendre dans le marché du film
qui se déroule parallèlement au festival, le Cinémart. Une
sorte de bulle peut-être, mais qui pour l’instant n’a pas
encore explosé, et se porte mieux que jamais : les films
à l’existence rendue possible grâce aux fonds d’aide sont
angolais, chinois, argentin, roumain. Nombre d’entre eux gagnent
des récompenses prestigieuses, sont internationalement distribués,
tel le plus récent d’entre eux, Uzak, film turc doublement
primé au festival de Cannes en 2003. Les autres, les « sans
prix », ont une existence plus incertaine, au-delà des
remparts de soie des festivals de cinéma internationaux. La
cruelle loi du marché règne ici aussi, comment faire autrement ?
Une communauté se dessine, sans - trop - de formatage :
si ce n’est peut-être un impératif « international »,
reflet d’une acrobatique économie de mécanos financiers.