Silence. Après quatre jours à cinq ou six films
chacun, on rêve parfois de silence. D'oublier les fanfares
exaspérantes de Kusturica - et pourtant son film est
emballant -, d'effacer les agressions sonores d'Old Boy
- et pourtant, ce cinémanga coréen est assez
époustouflant -, de perdre le fil des répliques
vachardes de Comme une image d'Agnès Jaoui -
et pourtant elles ont souvent brillantes.
Quant à la Croisette des soirs
de week end, c'est pire : elle vit au bruit des klaxons, des
décapotables façon juke box, des Clio transformées
tuning qui jouent toutes seules la danse du ventre en attendant
que le feu passe au vert.
C'est alors que le bout de mer que vous avez bien pris soin
d'emmagasiner dans la tête le premier jour revient à
la surface. Avec son clapotis, sa couleur profonde, ses petites
lumières qui de loin vous font signe, sans bruit.
Et le bateau d'Amarcord surgit, puis la baleine de Moby
Dick, aussi blanche que la robe de Marilyn qui tourbillonne
au-dessus de la grille d'aération d'un métro
dont les couloirs où fonce un type en roller débouchent
face à un immense piano déposé au bord
de la mer. Le clapotis reprend. Il est quatre heures, Cannes
s'endort.